Un martelage dans la Drôme pour sensibiliser les partenaires de l’ONF
Pourquoi cet arbre est-il désigné pour être abattu ? Pourquoi l’avoir choisi lui plutôt qu’un autre ? Pourquoi cet arbre mort est-il conservé ? Autant de questions que peut soulever la gestion forestière de l’ONF auprès de ses partenaires (élus, associations de protection de la nature, acteurs des forêts privées, etc.). Pour y répondre, expliquer ses choix et présenter les enjeux de la gestion multifonctionnelle des forêts, l’agence Drôme-Ardèche de l’ONF a organisé, mardi 24 septembre 2024, une journée immersive en forêt communale de
Lus-la-Croix-Haute (Drôme).
Une dizaine de participants étaient présents à cette matinée organisée par l’unité territoriale ONF du Diois. La journée a commencé par une présentation de la forêt et de la parcelle forestière n°157 à marteler. La forêt communale de Lus-la-Croix-Haute se situe dans le Haut-Bochaine entre 980 et 2030 mètres d’altitude. Il s’agit d’une zone en transition climatique avec un climat montagnard aux fortes influences méditerranéenne. La parcelle concernée était majoritairement composée de hêtres et de sapins.
Entre choisir les arbres à couper et ceux à conserver pour leur valeur écologique, le martelage est une opération complexe. Les arbres à récolter sont sélectionnés au profit de plus jeunes qui vont poursuivre leur croissance et auront ainsi plus de place et de lumière pour se développer. Les bois choisis sont marqués au marteau sur l’écorce et à la souche.
Les consignes étaient de marteler principalement du hêtre et du sapin pectiné dont le diamètre était compris entre 45 et 60 cm. Certains érables ont pu également être désignés afin de faciliter le passage des engins dans les chemins d’exploitation. Au vu de la faible proportion de gros bois dans la parcelle, il était important d’en maintenir le plus possible pour conserver la structure irrégulière du peuplement et favoriser le mélange feuillus-résineux. Les partenaires devaient aussi éviter les zones de présence de l’Epipogon, une petite orchidée forestière protégée présente sur la parcelle, matérialisées par de la rubalise.
Pendant le martelage, les techniciens forestiers désignent aussi d’un triangle pointe vers le bas sur l’écorce des arbres bio qui ne pourront pas être abattus (triangle réalisé à la griffe et recouvert de peinture chamois). Il s’agit principalement d’arbres morts, d’arbres vivants ou sénescents abritant des dendro-microhabitats (fissures, cavités, trous d’insectes, lichens…) ou de gros arbres à valeur écologique qui vont permettre de constituer une trame de vieux bois essentielle au développement de la biodiversité et au bon fonctionnement de l’écosystème forestier dans son ensemble. Ils sont en effet de vrais refuges pour les chauves-souris, les pics, les insectes, etc. Concernant ces arbres, les consignes étaient d'en conserver 3 par hectare au minimum (2 vivants et 1 mort) et de conserver systématiquement les hêtres à cavité, utilisés comme refuge par les petites chouettes. Il fallait aussi veiller à diversifier les essences de feuillus conservés en arbres bio.
Une mise en situation
Les participants ont ensuite constitué des groupes de trois, avec à chaque fois un membre de l’ONF, afin d’effectuer un martelage en virée (en avançant progressivement en ligne pour couvrir toute la surface de la parcelle). Les invités se sont glissés dans la peau des techniciens forestiers de l’ONF : ils choisissaient les arbres à marteler, prenaient toutes les données nécessaires (diamètres, etc.), les entraient dans le logiciel de suivi, marquaient les arbres avec le marteau et désignaient les arbres bio. Leur choix devait aussi prendre en compte tous les rôles de la forêt : production de bois, accueil du public avec les sentiers de randonnées et les pistes de skis, préservation de la biodiversité avec la présence de petites chouettes de montagne et d’espèces floristiques protégées, etc.
Cette journée est très importante car cela nous donne la possibilité de communiquer sur l'action de martelage qui est notre cœur de métier. Elle permet à nos différents partenaires de mieux appréhender tous les enjeux qui composent la désignation des arbres durant un martelage.
Si la journée était surtout axée sur la construction d’une trame de vieux bois et sur le martelage, d’autres sujets ont été abordés : dépérissement du sapin, renouvellement des parcelles, missions générales du forestier, etc.
D’après le diagnostic de terrain effectué en préparation du martelage, le volume d’arbres à prélever pour une gestion durable du peuplement s’élevait à 40m³ par hectare. Lors de cette journée, trois hectares ont été martelés. 57 arbres ont été marqués, soit un volume de 120 m³, et 22 arbres bio ont été identifiés.
Cette journée permet d’initier les partenaires de l’ONF au martelage en abordant les différentes problématiques qui gravitent autour. Une sensibilisation qui permet aussi de favoriser le dialogue et de prévenir les conflits entre les différents acteurs de la forêt, tous engagés pour sa gestion durable.