En compagnie des coléoptères saproxyliques de la forêt de Cerisy
Parler de biodiversité en forêt ne peut s’envisager sans faire référence aux Coléoptères saproxyliques. Ces insectes appartiennent à la famille des organismes saproxyliques : c'est-à-dire des espèces qui dépendent du bois mort au moins pendant une partie de leur cycle de vie. Ils occupent ainsi une place très importante au sein des écosystèmes forestiers européens. Le bois mort héberge en effet près de 25% de la biodiversité forestière.
Les Coléoptères saproxyliques constituent à eux seuls près de 20 % de cette diversité et, avec 2.663 espèces en France, ils constituent le second groupe saproxylique le plus diversifié après les champignons lignicoles (c'est-à-dire vivant dans le bois). Ils occupent en forêt différentes fonctions indispensables dans les processus de dégradation et de recyclage du bois mort.
La forêt de Cerisy étudiée à la loupe
Depuis 2011, des inventaires de ces coléoptères saproxyliques sont réalisés en forêt de Cerisy (Normandie) par les forestiers naturalistes de l'ONF, spécialisés en entomologie (science étudiant les insectes).
Et les résultats montrent que la forêt de Cerisy est riche de cette faune, avec 189 espèces dont 46 indicatrices de la valeur biologique des forêts françaises. Ces résultats montrent le rôle déterminant de cette forêt dans la conservation de la faune forestière saproxylique en Normandie, grâce à la présence de micro-habitats favorables.
Pourquoi réaliser de tels inventaires ? La rareté des espèces présentes en un site représente une valeur biologique. Elle indique l’état de conservation de la forêt (ce qu’on appelle sa naturalité), en référence à d’autres sites ayant les mêmes caractéristiques biogéographiques mais où l’impact des gestions passées aurait pu faire disparaître des espèces. Des données essentielles pour les forestiers...
A la découverte des coléoptères saproxyliques
Le Mycetophagus ater est l'une des espèces d'intérêt patrimonial de niveau 3 : espèce jamais abondante ou très localisée.
©crédit photos/CLICNATLe Saperda scalaris est l'un des espèces les plus photogéniques de coléoptère saproxylique.
©crédit photos/CLICNATLe Tetratoma desmaresti est l'espèce d'intérêt patrimonial la plus forte de Cerisy (4 : espèces très rare).
©Pierre Zagatti/OPIELa capture des coléoptères, permettant leur identification, se fait à l'aide d'un dispositif appelé PolytrapTM.
©Sébastien Etienne/ONFLes individus collectés sont déposés dans un bac à eau pour faciliter leur tri. Puis, l'observation se fait sous loupe binoculaire. En effet, les critères permettant une détermination précise de l'espèce ne sont le plus souvent pas visibles à l'oeil nu. Ce travail de détermination est effectué par les spécialistes ONF en entomologie du Pôle national d’entomologie forestière de l’ONF basé à Quillan (Aude).
©Sébastien Etienne/ONFLe saviez-vous ? La forêt domaniale de Cerisy est classée Réserve naturelle nationale (RNN) depuis 1976. Elle est une des rares Réserves naturelles entièrement forestière en France. Elle bénéficie de ce statut compte tenu de la présence d’une espèce de carabe endémique (qui n’existe nulle part ailleurs dans le reste du monde) : le carabe doré à reflets cuivrés.
©Sébastien Etienne/ONFLa valeur biologique calculée de cette forêt est passée de 83 en 2016 à 103 en 2019, selon une méthode universitaire reconnue, développée par Guilhem Parmain en 2009. Cette valeur biologique est calculée en fonction du nombre d'espèces présentes et de leur valeur. Cette progression témoigne du développement de la présence de ces espèces, notamment grâce à la gestion forestière spécifique qui est menée par l’ONF.
L’évaluation faite au travers de cette étude positionne la forêt de Cerisy en classe 2 (intérêt local à national, toujours selon la méthode de G. Parmain), notamment par la présence d’une espèce très rare, le Tetratoma demarestii, qui bénéficie d’un indice de rareté le plus élevé. La valeur biologique de Cerisy se tient dans le peloton de tête des forêts du nord-ouest de la France.
Les partenaires de l'ONF
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Toutes les études menées depuis 2011 sur les coléoptères saproxyliques en forêt de Cerisy ont été financées par la Région Normandie et le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) de l’Union Européenne. Ils ont également permis l’étude d’un groupe particulier de papillons de jour : les rhopalocères, sur cette même forêt.