Notre-Dame de Paris : une charpente comme au temps des cathédrales
Le 15 avril 2019, face aux ravages du feu sur Notre-Dame de Paris, la France entière s’émeut. Pour sa reconstruction, les dons pleuvent et les questions se multiplient. Entre projets modernes et traditionnels, les avis divergent. De nombreux commentaires contradictoires circulent alors à propos de la charpente disparue qu'il faut désormais reconstruire. Faut-il sécher le bois plusieurs années ? Faut-il raser des forêts entières pour la rebâtir ?
Dans ce contexte, des professionnels de la filière bois se mobilisent. Car si l’on ne sait toujours pas avec quel matériau sera réalisée la nouvelle charpente de Notre-Dame, il est important de démontrer qu’elle peut être rebâtie à l’identique avec des chênes du XXIe siècle.
C’est autour de cette dynamique qu’un projet réunissant des acteurs publics et privés de la filière a vu le jour. Charpentiers sans frontières, France bois forêt, des propriétaires privés et l’ONF se sont associés pour en faire une première démonstration.
Des gestes des siècles passés
Le 24 janvier 2020, c’est sous une forêt brumeuse et un froid pinçant que l’ONF, France Bois Forêt et Charpentiers sans frontières se sont donné rendez-vous en forêt de Senonches pour la première étape : la coupe. Après s’être entretenus avec les forestiers de l'ONF, les membres de l’association Charpentiers sans frontières ont réalisé, dans les conditions du Moyen Âge avec haches, coins et passepartouts, l’abattage des arbres de haute futaie (parmi les plus âgés et les hauts), la coupe des branches et l’équarrissage à la hache. Des gestes ancestraux, transmis entre bûcherons de génération en génération. Pour que ce savoir-faire soit perpétré, certains viennent de loin. Serge Turberg forgeron et bûcheron est venu spécialement de Suisse.
Cette journée est un aller-retour en 1240, dans une forêt silencieuse où le bruit des haches et des scies rythme les heures. "Il n’y a aucun bruit. Juste une scie, une hache, rien d’autre de bruyant et pas de poussière. En travaillant à la main, on respecte la matière. On respecte l’arbre que l’on abat. On le travaille en suivant ses courbes, sans le contraindre, en essayant de le comprendre plutôt que de le forcer à s’adapter à nous. On s’adapte à la matière pour avoir un bâtiment qui dure dans le temps", témoigne Gustave Rémon, membre de Charpentiers sans frontières.
Il est indispensable de rappeler comment on bâtissait les charpentes au Moyen Âge .
Une sélection minutieuse
Avant la démonstration, plusieurs arbres ont été sélectionnés par des spécialistes charpentiers et des experts de l’architecture du patrimoine, accompagnés de techniciens forestiers de l’ONF. Cinq chênes ont été choisis en forêt domaniale de Senonches dans l’Eure et Loire (28). "Ils n’ont pas forcément choisi les plus gros diamètres, mais ceux les plus proches des dimensions permettant d’utiliser au mieux la matière. Ainsi nos arbres hauts permettent la réalisation de plusieurs morceaux nécessaires à la charpente. La rectitude du fil est également très importante afin d’éviter les déformations", explique Patrick Ruault, technicien forestier à l'Office national des forêts en charge de la gestion de la forêt de Senonches, avec James Levreau également technicien forestier. Ces chênes issus de la futaie régulière sont le fruit du travail des équipes de l’ONF depuis des décennies.
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