Forêt des Trois-Pignons : une année de concertation fructueuse avec les élus et associations
Il est des régions où la forêt cristallise les passions, l’Île-de-France en fait partie. Il n’est pas rare que les coupes mettent le public en émoi. Comme cela a été le cas dans la forêt domaniale des Trois-Pignons. En janvier 2020, l’Office national des forêts (ONF) devait procéder à différentes coupes d’arbres sur les territoires communaux de Noisy-sur-Ecole et du Vaudoué, après une longue période sans intervention. Les inquiétudes exprimées par un collectif de citoyens avaient conduit à suspendre ces interventions avant qu’elles ne démarrent.
Dans cette forêt prisée par les amateurs d’escalade et autres promeneurs, les enjeux liés à l’accueil du public atteignent un niveau élevé. L’absence d’interventions ces dernières années pouvait laisser croire que la forêt n’avait pas besoin d’être gérée.
En février 2021, l’ONF a lancé une concertation sur la gestion durable de cette forêt. Pour cela, il s’est appuyé sur un groupe de travail constitué lors du comité de pilotage Fontainebleau, Forêt d’Exception® du 27 février 2020, qui comprend en particulier les élus et le collectif opposés aux interventions sylvicoles prévues. Si ce groupe de travail n’a pas pu se rassembler en 2020 en raison de la crise sanitaire, c’est désormais chose faite. En effet, depuis un an, les principales parties prenantes y participent (associations d’usagers, élus locaux, représentants du collectif), avec comme point d’orgue, l’organisation de trois rendez-vous techniques. Durant ces rencontres, chacun a pu apporter sa vision sur la forêt, exprimer ses inquiétudes, comprendre les choix des forestiers et les actions de l’ONF.
Février 2021 : un premier rendez-vous sur la gestion irrégulière
Le premier rendez-vous animé par l’association Pro Silva France et l’ONF se déroulait entièrement en forêt en présence d’une trentaine de participants du monde associatif (collectif des Trois-Pignons, Amis de la forêt de Fontainebleau, naturalistes, représentants sportifs…), de la filière bois (Fibois, CRPF) mais aussi des élus locaux et institutions (maires, conseillers départementaux de Seine-et-Marne, DDT, DRIEAT).
L’observation fut le maître mot de cette journée technique rythmée par plusieurs exercices pratiques. L’objectif visait à faire comprendre ce qu’est la sylviculture irrégulière. En visitant différentes parcelles forestières, les participants ont pu voir les mécanismes de la régénération naturelle, puis mesurer l’évolution rapide du paysage quelques années après une coupe irrégulière. Au sein d’une parcelle tous les stades de développement cohabitent, des semis jusqu’au vieux bois, et permettent de maintenir un boisement permanent.
Ce mode de gestion qui s’applique désormais depuis 2017 dans les forêts domaniales d’Île-de-France évite les modifications paysagères brutales que le public n’accepte plus.
Relancer une sylviculture répondant aux attentes sociales
Dans de nombreux secteurs de la forêt domaniale des Trois-Pignons, les pins sylvestres dominent aujourd’hui. Sur ces sols sableux, ils croissent plus vite que la plupart des feuillus et ne leur laissent peu de place. Avec les coupes, les forestiers favorisent le développement d’essences feuillues comme le chêne. L’ONF souhaite y maintenir une diversité d’espèces d’arbres : une des clés pour l’avenir afin que la forêt soit plus résiliente face au changement climatique. Dans le cadre d’une sylviculture durable, le chêne doit pouvoir bénéficier d’une gestion visant à obtenir des arbres de qualité et ainsi de perpétuer l’action de générations de forestiers.
En avril 2021, lors du deuxième rendez-vous, les discussions ont porté sur les actions sylvicoles envisagées. Autrement dit, comment relancer une gestion économiquement réalisable dans un contexte climatique changeant et acceptée par le public. Au-delà de la coupe d’arbres, une autre intervention interpelle : l’ouverture des cloisonnements d’exploitation (cf. schéma). Le public perçoit assez mal ces cheminements dans les parcelles, réservés au passage des engins forestiers. Ces cloisonnements, généralisés depuis 15 ans selon les recommandations scientifiques, visent à protéger les sols, en évitant que les engins ne parcourent les parcelles de manière anarchique. Une meilleure intégration paysagère est aujourd’hui attendue pour limiter leur impact visuel comme le suggère désormais les partenaires de l’ONF.
Deux chantiers expérimentaux envisagés cette année
En novembre 2021, le groupe de travail s’est retrouvé pendant un martelage, avec l’objectif de désigner les arbres à couper dans les parcelles 164 et 168. De l’utilisation d’engins plus légers à des cloisonnements davantage espacés en passant par une meilleure intégration paysagère des coupes, différentes modalités seront expérimentées et suivies dans le temps.
Dès cet hiver, l’ONF aménagera les cloisonnements d’exploitation dans ces deux zones. Si les arbres se développent après cette intervention, une première coupe irrégulière sera programmée dans quelques années, puis tous les 12 à 15 ans en moyenne. Ces actions apporteront la lumière et l’espace utiles aux arbres conservés pour qu’ils grandissent dans les meilleures conditions et aux jeunes semis afin qu’ils germent. Avec cette sylviculture, la forêt se renouvelle naturellement. C’est-à-dire qu’on laisse les jeunes semis s’installer à partir des graines disséminées au sol par les arbres adultes.
Partager une vision commune
A l’issue de cette année de concertation, chacun a pu s’apercevoir que gérer une forêt de 3 000 hectares n’est pas chose facile, tant les sujets sont nombreux et variés. Promeneurs, naturalistes, élus, chasseurs… et usagers de la forêt ont tous en tête que la gestion appliquée devrait répondre prioritairement à leurs besoins. Conscient de cette diversité des points de vue, l’ONF souhaitait engager cette "démarche ouverte". Ces journées pleines d’enseignements offrent de nouvelles perspectives de gestion aux Trois-Pignons. Tout le monde s’accorde à dire que la forêt des Trois-Pignons a besoin d’être entretenue. Une vision commune se dégage aujourd’hui dont la pérennité de la forêt face au changement climatique est l’enjeu majeur.
Écouter les professionnels parler de leur expérience est très enrichissant. On voit bien que la sylviculture évolue. L'idée de la changer pour répondre aux attentes sociales est une très bonne chose. Cette concertation organisée par l’ONF est une occasion d’échanger sur les choix de gestion auxquels nous sommes associés. En tant qu’associatif et représentant du collectif, nous sommes satisfaits de ce travail engagé par l’ONF depuis un an dans la forêt des Trois-Pignons.