À la découverte de la Mygale à chaussette en forêts domaniales de Dourdan et du Bréau
Mygale à chaussette, et si on faisait connaissance ? Les Mygales ne sont pas toutes d’une taille impressionnante ! Certaines ne mesurent qu’environ 1,5 cm comme Atypus affinis plus communement appelée Mygale à chaussette.
C’est une petite mygale munie de chélicères (crochets venimeux articulés des araignées) dont les tiges portant les crochets sont plutôt volumineuses par rapport à son corps. Ces crochets renferment des glandes à venin, qui lui permettent de paralyser les proies grâce à la présence de neurotoxines et aussi de les prédigérer avec des enzymes.
Arachnophobe n'ayez crainte ! Nous ne sommes pas des proies !
Parmi les 49 250 espèces la grande majorité possède des crochets de trop petite taille pour mordre la peau humaine. Et même si cela arrive dans certaines circonstances, ce ne sont que des morsures de défense et non d’attaque. De plus le venin est loin d’être systématiquement injecté (morsure sèche), c’est un produit précieux qu’elles gardent surtout pour la fonction de nutrition.
Mais, quand bien même elles en injecteraient, celui-ci est très peu actif sur les gros mammifères que nous sommes. A noter également qu’aucune araignée n’est véritablement mortelle pour l’homme. Dans quelques rares cas le problème sera l'infection ou la surinfection découlant de la morsure et non pas la réaction directe au venin de l'araignée.
La Mygale à chaussette, terricole et discrète
Les Atypus sont difficiles à croiser car elles passent la majeure partie de leur vie dans leur "chaussette", un tube de soie épaisse enfoui aux trois quarts dans le sol. Le quart extérieur de la chaussette sert de piège pour la capture des proies. Les chélicères qui renferment les glandes à venin leur permettent de se nourrir et aussi de creuser le terrier car les extrémités des deux tiges sont munies de dents formant une sorte de rateau. Le mâle peut être rencontré en mai-juin mais surtout durant l’automne, saison de reproduction, car il quitte son tube et se déplace à la recherche d’une femelle. Les jeunes sont également visibles au moment de leur dispersion aérienne.
Contrairement à la majorité des araignées de France métropolitaine dont la longévité est courte (souvent une année ou deux), les Atypus peuvent vivre jusqu’à une dizaine d’années, les mâles étant matures après 3-4 ans et les femelles au bout de 5-6 ans. Cette mygale européenne n’est pas agressive, il n'y a aucun danger à la croiser.
Fiche d’identité : la Mygale à chaussette
Atypus affinis (Eichwald, 1830).
Sous-ordre : MYGALOMORPHE ;
Famille : ATYPIDAE ;
Distribution mondiale : Europe, Afrique du Nord ;
Taille du corps - femelle : 10-16 mm, mâle : 7-9 mm ;
Mode de vie : Recherche un sol meuble pas trop sec, dans des endroits moyennement ensoleillés au sol.
Tisse un tube de soie sur une grande partie de sa longueur souterraine et 1/4 aérienne pour la chasse.
Les Mygales en Europe
Les Mygales sont généralement nocturnes ou crépusculaires et vivent dans des abris. Elles ont colonisé tous les continents. Les Mygales de la famille des Atypidae sont représentées par 3 espèces en Europe de l’Ouest, Atypus muralis non présente en France et les 2 autres sur le territoire :
- Atypidae piceus qui habite les pelouses sèches dans les régions plus méridionales et continentales de France.
- Atypidae affinis plus répandue, avec une répartition s’étendant jusqu’en Suède.
En France il existe également d’autres mygales dites maçonnes (genre Cteniza, 3 espèces en France et genre Nemesia, 16 espèces) qui habitent dans des terriers tapissés de soie et fermés par un opercule. On les rencontre dans le midi ou en Corse.
Atypus affinis et son habitat
Les landes des forêts domaniales de Dourdan et du Bréau accueillent des espèces végétales et animales particulières. Elles représentent un habitat d’une physionomie et d’une composition floristique précise correspondant à une végétation ligneuse basse des terrains pauvres et généralement acides. Les bruyères sont bien adaptées aux contraintes environnementales locales, au sol de nature sableuse à tendance sèche, avec un système racinaire dense et une symbiose mycorhizienne.
Une symbiose mycorhizienne correspond donc à l’association entre un champignon et une racine de plante, puisque le terme "mycorhize" représente une racine (ou portion de racine) "habitée" par un champignon mycorhizien. L’avantage de la symbiose mycorhizienne est que les deux parties profitent de cette association : le champignon obtient des sucres et des composés carbonés de la plante, alors que cette dernière reçoit de l’eau et des minéraux. Du fait de l’ensoleillement les insectes sont bien présents fournissant des proies de choix aux différentes espèces d’araignées. Des reptiles comme les lézards, des oiseaux ou des mammifères comme les chauves-souris viennent y chasser. C’est dans ce biotope que vit la mygale à chaussette, terricole, Atypus affinis.
Abri, piège, chambre nuptiale
La partie aérienne de la chaussette est camouflée par des particules de terre et des débris végétaux environnants ce qui la fait ressembler à une racine partiellement enterrée. Elle joue le rôle de détecteur et transmet les vibrations lors du passage d’une proie à sa surface. Cloportes, coléoptères, ou autres proies sont alors crochetées à travers la paroi de soie puis saisies et ramenées à l’intérieur dans la partie souterraine pour être consommée par une petite déchirure qui sera réparée par la suite. Le diamètre et la longueur de la chaussette dépend de l’âge et de la taille de l’individu. Cet abri permet aussi à l’araignée de muer cachée, et pour la femelle d’accueillir le mâle puis de pondre et de rester quelque temps avec ses jeunes jusqu’à leur dispersion.
Qu'en est-il de la reproduction de la Mygale à chaussette ? Au moment de la reproduction, des molécules volatiles (phéromones) particulières à chaque espèce sont émises. Le mâle mature en recherche de partenaire se déplace en suivant l’odeur ; le repérage effectué, il tapote sur la paroi du tube extérieur d’une certaine façon et peut entrer en déchirant la soie du tube s’il n’est pas repoussé ce qui signifie que la femelle est consentante. Après l’accouplement le mâle peut cohabiter quelques mois avec la femelle, puis il meurt et est parfois consommé.
Lorsque la fécondation a lieu en automne-hiver, la femelle pond au cours de l'été suivant. Le développement embryonnaire est synchronisé avec le cycle des saisons et ce n’est donc qu’à partir de juin, qu’elle pond de 80 à 150 œufs dans un cocon de soie gardé dans la zone souterraine supérieure du tube. Les œufs éclosent en été et sortent de petites araignées dépigmentées sans soies qui ne se nourrissent pas et se déplacent peu ; elles resteront avec la femelle jusqu'à leur dispersion.
Après la première mue, 2 semaines plus tard, la petite mygale possède pigments, soies sensorielles, et organes lui permettant de se nourrir et de produire ses premiers fils de soies. Lorsque ce préjuvénile a mué et qu’il ressemble de plus en plus à l’adulte il quitte le tube maternel, en général le printemps suivant en mars, avril. La dispersion des jeunes est aérienne, ils rompent le temps de cet envol avec leur mode de vie terrestre. La petite Mygale à chaussette se positionne sur un support en hauteur, émet plusieurs fils de soie et se laisse entraîner par le vent. La dispersion peut aussi être terrestre et dans ce cas il est fréquent de rencontrer des petites chaussettes dans le secteur proche du tube de la femelle.
La dispersion, l’arrivée sur un nouveau territoire, la possibilité de choix offerts pour s’installer, les prédateurs, sont autant d’épreuves à passer avant de commencer une vie solitaire et souterraine pour la petite mygale. Cette mygale comme toute autre araignée a des prédateurs et parasites parmi plusieurs groupes zoologiques tels mammifères, oiseaux, mais aussi autres arachnides et même les araignées elles-mêmes, ainsi que des insectes comme des guêpes solitaires.