Forêt domaniale de Chinon : un terrain de chasse sur-mesure pour les chauves-souris
Pour protéger les chauves-souris, cette coopération est exemplaire ! Avec la réserve biologique du vallon de Maupas et trois secteurs classés zone Natura 2000, le massif domanial de Chinon est connu pour sa richesse écologique remarquable. Les futaies de la forêt domaniale de Chinon abritent de nombreux oiseaux (passereaux, pics, rapaces, etc.), mais également 19 espèces de chauves-souris parmi les 25 espèces présentes en région Centre-Val de Loire.
Quand les forestiers ont constaté que l’une de ces espèces, le Petit rhinolophe, avait établi une colonie de reproduction dans une maison forestière, ils ont décidé de s’associer avec leurs partenaires pour leur offrir une installation tout confort !
Le saviez-vous ?
Les chauves-souris sont les seuls mammifères à savoir voler comme les oiseaux. Mais si ces derniers utilisent leurs bras pour voler, les chauves-souris utilisent leurs mains. Leurs ailes sont en effet des mains qui se sont transformées, dont les doigts sous-tendent une membrane de peau souple et élastique ce qui leur offre une grande agilité de vol. Elles font également partie des rares animaux qui peuvent "voir avec leurs oreilles", chassant et s’orientant dans l’obscurité grâce à des ultrasons. Cette technique d’écholocation leur donne une image très précise de leur environnement et de leurs proies.
Une colonie de reproduction est un gîte utilisé chaque année par les chauves-souris pour allaiter les petits durant l’été. Si elles sont dérangées pendant cette période, les mères peuvent choisir de fuir en laissant leur petit ou bien en l’emportant accroché à leur corps. Ne sachant ni voler ni se nourrir seuls, les jeunes qui sont abandonnés ou qui tombent pendant le vol sont condamnés. Avec un seul petit par femelle et par an, il est d'autant plus important de préserver la tranquillité de ces maternités.
La première action a donc été de sécuriser les accès à la maison forestière pour s’assurer que personne ne puisse déranger les chauves-souris. En plus des travaux, un panonceau informatif a été installé sur la maison pour sensibiliser à leur présence.
Pour s’assurer qu’elles aient tout ce dont elles ont besoin, un terrain de chasse a ensuite été créé sur mesure pour elles. Cette espèce, le Petit rhinolophe, est particulièrement friande d’une proie spécifique : le Carpocapse des pommes. Ce petit papillon de la famille des "tordeuses" se développe dans les pommiers. Ce sont donc des pommiers que les forestiers ont planté à proximité de la maison !
Pour la sélection des arbres, l’ONF a travaillé avec l’association locale "les Croqueurs de pommes de Touraine", spécialisée dans la recherche, la sauvegarde et la promotion du patrimoine génétique fruitier régional.
Les travaux préparatoires, la plantation et l’arrosage ont été réalisés avec l’association "Entraide et solidarités" sous la forme d’un chantier d’insertion. Des élèves de l’école de Saint-Benoît-la-Forêt ont également participé à la plantation dans le cadre d’un programme pédagogique, avec l’appui d’un technicien forestier local.
Un panneau éducatif installé près de la plantation
Son objectif ? Partager les connaissances sur cet animal fascinant et sensibiliser aux enjeux de préservation de cette espèce. En effet, bien qu’elles soient protégées par la loi de 1976 relative à la protection de la nature ainsi que par deux arrêtés (17 avril 1981 et 23 avril 2007), les chauves-souris restent fragiles.
Elles sont particulièrement menacées par la transformation des paysages, la disparition de leurs gîtes, la raréfaction de leurs proies, la pollution lumineuse, les pesticides et les accidents de la route.
Il est donc important pour les forestiers de sensibiliser le public à la protection de ces espèces et de développer des actions concrètes pour les préserver.
A chaque période ses besoins
Tout au long de l’année les chauves-souris ont des besoins spécifiques :
- un milieu aux conditions climatiques stables en hiver ;
- un gîte d’été adapté à la mise bas et à l’élevage des jeunes ;
- des terrains de chasse ;
- des sites intermédiaires au printemps et à l’automne pour les échanges entre individus ;
- des axes de transit entre ces différents habitats.
Des acteurs complémentaires au service de la biodiversité
Ce projet a pu prendre vie grâce aux associations impliquées et au soutien financier du CNPE de Chinon (Centre nucléaire de production d'électricité). Un partenariat CNPE-ONF qui dure depuis 7 ans et a permis de conduire plusieurs actions de développement de la biodiversité et de pédagogie en milieu forestier, avec près de 17 000 arbres plantés depuis 2014 et plus de 350 scolaires accueillis en forêt.
Le savoir-faire et la compétence de chaque acteur ont abouti à la réalisation de cette mission de préservation. Ces derniers étaient heureux de se réunir pour célébrer ensemble l’inauguration du terrain de chasse des chauves-souris le 3 juin dernier.
Cette opération illustre parfaitement notre volonté d'établir des partenariats les plus larges possibles pour améliorer encore la gestion des forêts qui nous sont confiées.
Une démarche qui s’inscrit dans le cadre du Plan national d’action (PNA) en faveur des chiroptères auquel l’ONF participe activement, en forêt domaniale de Chinon et sur tout le territoire.
Pour en découvrir plus sur ces animaux fascinants, consultez l'article sur les espèces de chauve-souris à travers le monde.
Insecticides naturels à l’appétit d’ogre
Exclusivement insectivores, les chauves-souris consomment chaque nuit entre le quart et le tiers de leur poids en insectes (mouches, moustiques, moucherons, papillons, hannetons, araignées, criquets, sauterelles...). Un seul individu peut ingurgiter jusqu’à 600 moustiques par nuit !
Trouvant une ressource abondante de nourriture en forêt, elles contribuent à la régulation des ravageurs forestiers, à la santé des arbres et donc à l’équilibre global de l’écosystème.
Chaque espèce de chauves-souris à ses préférences en matière de proies. La présence de plusieurs espèces dans une forêt témoigne par conséquent d’une grande diversité d’insectes se développant dans des habitats variés (feuillus, résineux, fruitiers, zones humides, bois sec...). C’est pour cette raison qu’elles sont considérées comme un bon indicateur de la santé d’une forêt.