En France, la forêt est une composante majeure des territoires, participant à leur développement et à leur attractivité, mais aussi à leur protection. En effet, le couvert boisé remplit une double fonction très efficace : il fixe les sols en limitant leur vulnérabilité à l’érosion et stabilise le manteau neigeux en zone de départ d’avalanche ; et il joue un rôle d’écran, d’interception ou de frein face à des écoulements et chutes de blocs.

Pour lutter contre ces phénomènes naturels, l’Administration des Eaux et Forêts a créé en 1861 le service de Reboisement des montagnes, devenant plus tard le service de Restauration des terrains en montagne (RTM). A l’époque, sa mission consiste à reboiser les terrains dégradés et à aménager des dispositifs de protection des populations contre les risques naturels qui combinent des techniques de génie civil et génie écologique.  

Avant le déboisement, le résineux était déjà le roi des montagnes ; c’est donc très logiquement parmi ces essences que les forestiers vont se tourner afin de recomposer les forêts de montagne. Pin sylvestre, pin cembro, mélèze, pin à crochets sont les essences les plus plantées dans le cadre de la RTM, devant le sapin et l’épicéa qui viennent en renfort des hommes et de leurs ouvrages de protection. 

Aménagement des terrains de montagne en forêt domaniale de la Creuse

Aujourd’hui ce service spécialisé de l’ONF agit en appui aux services de l’Etat et aux collectivités territoriales dans la gestion et la prévention des risques naturels : avalanches, crues torrentielles, glissements de terrain, chutes de blocs et éboulements, risques d’origine glaciaires et périglaciaires.

Répartis sur 11 départements alpins et pyrénéens où l’érosion est la plus active et avec des problématiques liées aux avalanches, une centaine de membres de l’ONF sont mobilisés dans le cadre de deux missions d’intérêt général (MIG) confiées par l’Etat.

 L’ONF assure ainsi, pour le compte du ministère en charge des Forêts :

• La gestion et le suivi de 250 000 hectares de forêt domaniale RTM;
• La gestion, le suivi et la programmation des travaux sur les 23 000 ouvrages de protection (seuils de correction torrentielle, dispositifs contre les chutes de blocs, dispositifs paravalanches…) présents dans ces forêts domaniales RTM;
• Le suivi de la mise en œuvre de travaux neufs (création de nouveaux ouvrages ou d’importantes réparations) et la mise en œuvre de travaux d’entretien courant;
• La mise à jour d’une base de données « ouvrages » pour le suivi des dispositifs de protection;
• L’apport d’appui technique aux services du ministère;
• La participation à des groupes de travail d’experts internationaux.

Ces missions représentent 50% de l'activité des services RTM de l'ONF.

En complément de ces actions, les services RTM de l’ONF sont également chargés par le ministère de l'Ecologie d’une mission d’intérêt général liée à la prévention des risques naturels. Forts de leur rôle historique et de leur expertise en la matière, ils s’occupent notamment :

• D’observer les phénomènes naturels afin d’améliorer la connaissance des risques;
• D’apporter leur appui technique et opérationnel aux territoires (préfets de départements, aux services de l’Etat et aux collectivités territoriales sur la demande de l’Etat) notamment en cas d’événements naturels;
• D’assurer, en collaboration avec l’Institut de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE), les observations de terrain relatives à l’enquête permanente sur les avalanches (EPA);
• D’assurer la « mémoire » des événements naturels en montagne dans les 11 départements RTM en renseignant et administrant la base de données « évènements » (qui recense à ce jour plus de 45 000 événements naturels survenus en montagne);
• De piloter et participer à des développements méthodologiques afin de partager leur expertise;
• De piloter ou participer à des travaux de portée régionale, nationale ou internationale.

Ces missions dédiées à la prévention des risques naturels représentent 36% de l’activité des services RTM de l’ONF.

Ces experts sont parfois amenés à intervenir sur d'autres territoires que les onze départements alpins et pyrénéens.

En dehors de la réalisation de ces missions d’intérêt général, ces experts des risques naturels en montagne sont également assignés à d'autres tâches indispensables pour le compte de l'Etat et des collectivités territoriales. 

Pour les services de l’Etat (Préfecture/direction départementale des territoires), les services RTM peuvent réaliser ponctuellement une étude pour des cas spécifiques : élaboration de cartes d’aléas après des événements exceptionnels ou suite à la mise en place de nouvelles directives nationales. Ces études font ensuite office de référence au niveau national pour la mise en application de ces directives.

Pour les collectivités territoriales, les équipes de l'ONF sont également amenées à conduire des études et à réaliser des missions de maîtrise d'œuvre. Cela concerne principalement des petites opérations pour lesquelles la proximité géographique et la connaissance des sites des techniciens RTM constitue un gain d’efficacité collective (dispositif de protection contre les avalanches d’un lotissement, de protection contre les chutes de blocs d’une route communale, de reprise d’une chenalisation d’un torrent à laves torrentielles….).

Actuellement, les études et expertises deviennent aussi prédominantes dans ces prestations concurrentielles. C’est notamment le cas des études approfondies, impliquant parfois :

• Le développement de nouvelles approches ; par exemple, pour adapter l’analyse des risques des études de danger des systèmes d’endiguement au contexte torrentiel ;
• L’utilisation d’outils de modélisation dont la maîtrise par les services ONF-RTM est également requise pour bien comprendre les subtilités et les limites de tels outils.

Aujourd’hui, les forêts comme beaucoup d’autres écosystèmes souffrent du changement climatique. L’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) dressait en fin d’année 2023, un tableau inquiétant de l’état de santé des forêts.

Changement climatique et risques naturels 

Le changement climatique accroît donc les risques naturels en raison de l’élévation des températures, ou de l’accroissement des épisodes de sécheresse. Il rend aussi les précipitations plus brutales et accélère la fonte des neiges et des glaciers, modifiant les phénomènes de crues torrentielles et d'avalanches. Parallèlement, il touche les forêts qui dépérissent, et bouleverse la gestion forestière, renforçant la menace au travers de la disparition du rôle de couverts protecteurs. 

Ces conditions climatiques moins favorables vont s’étendre (territoires concernés plus vastes, périodes sensibles plus longues) et s’accentuer (phénomènes extrêmes plus fréquents et plus intenses). Les forêts de montagne et les indispensables fonctions de protection qu’elles remplissent sont donc elles aussi fortement menacées. Ce constat conduit aujourd’hui les forestiers de l’ONF en zones de montagne à renforcer leur surveillance quotidienne des forêts, à diversifier leur mode de gestion ainsi qu’à adapter les forêts aux divers impacts du changement climatique.

Leur expertise et leur savoir-faire sont plus que jamais nécessaires pour le maintien des forêts de montagne si emblématiques des paysages forestiers français et des ouvrages de protection parfois mis à mal lors d’épisodes climatiques extrêmes. On se rappelle notamment des crues et inondations qui ont causé de lourds dégâts dans les Alpes-Maritimes après le passage de la tempête Alex en 2020.

En 2023, les équipes de l’ONF étaient également en première ligne pour apporter leur expertise aux services de l’Etat sur le terrain à deux reprises : lors des importantes crues et inondations qui ont frappé les Hautes-Alpes dans différents secteurs ainsi que des éboulements d’un pan entier de falaise sur des infrastructures routières en Maurienne (Savoie).

Plus récemment, ces professionnels des risques en montagne sont intervenus une nouvelle fois sur les départements de la Savoie, de l’Isère, des Pyrénées-Atlantiques et des Hautes-Pyrénées qui ont été touchés par de fortes précipitations et des crues torrentielles aux conséquences matérielles très lourdes.

Un risque nouveau dû au réchauffement climatique

Récemment, en raison du changement climatique, du dégel en haute montagne et de l’augmentation des risques glaciaires et périglaciaires, l’Etat a lancé en 2020 un plan national porté par le ministère chargé de l’Ecologie. Ce plan vise à identifier ces risques, les populations et les infrastructures qui y sont exposées, à créer une communauté d’intérêt et d’échanges ainsi qu’à accompagner les collectivités locales dans des démarches de prévention.

Dans ce cadre, les services RTM de l’ONF ont été chargés de mener des actions concrètes pour assurer la sécurité des populations et des biens. En se fondant sur leurs savoirs et savoir-faire acquis de longue date, ils ont développé une expertise adaptée à ces risques « nouveaux » et pluriels : avalanches de glace favorisées par le dégel des glaciers, écroulements rocheux provoqués par la fonte de la glace interstitielle présente dans les fissures des roches, apparition de lacs aux berges instables qui menacent de causer des crues torrentielles.