Tronçais : les ronds forestiers sécurisés pendant le confinement
Les carrefours ou ronds forestiers font partie du paysage de la forêt de Tronçais (Allier). La plupart date de la fin du XIXe siècle. La situation sanitaire des arbres les plus âgés et l'affaiblissement généralisé d’espèces, comme l’épicéa commun, posent des problèmes de sécurité. Avant la réouverture de la forêt au public et devant l’urgence, l’ONF est intervenu pour enlever les arbres les plus dangereux : une quarantaine d’arbres sur 14 des 57 ronds que compte la forêt. Leurs reboisements feront l’objet d’un travail commun avec le comité Forêt d’Exception® après une expertise des sols qui sera lancée durant l'automne 2020.
Il est très probable que l’ensemble des épicéas finissent à terme par disparaître des ronds forestiers de la forêt de Tronçais. Or ils constituent encore plus de 40% des arbres sur les ronds. A proximité des routes ouvertes à la circulation, des zones d’accueil du public, ils représentent un réel danger. L'ONF a pris la décision de couper les sujets morts ou trop dégradés (par la sécheresse ou les maladies). Cette opération a débuté début mai 2020 sur 25% des ronds. Plusieurs bordures de routes publiques sont également concernées par une mortalité d’épicéas mais aussi de hêtres, de pin sylvestres. Des opérations seront lancées d’ici juin pour sécuriser les routes forestières et certaines zones d’accueil du public.
Des arbres âgés et victimes du réchauffement climatique
Le renouvellement de ces arbres présents a débuté depuis plusieurs années. Pour répondre à l'évolution climatique, l’ONF remplace progressivement les épicéas et sapins par des arbres mieux adaptés au sol, à l’exposition au soleil, à leur résistance à la sécheresse. Aujourd’hui 31 espèces sont présentes sur les ronds forestiers. Le nombre de feuillus a pratiquement doublé depuis 2000 (date du dernier décompte). Le tulipier de Chine et le liquidambar comme le séquoia toujours vert pour les conifères, ont complété les collections.
Garder les espèces qui donnent de bons résultats et choisir d’autres espèces, c’est l’approche choisie par l’ONF. L’évolution du climat, le comportement des essences forestières face aux déficits hydriques dus aux sécheresses répétées, et leurs sensibilités face aux agents pathogènes, sont des critères importants pour le choix des nouveaux arbres à planter.
Des essences, pour l’instant peu présentes sur les ronds, comme le cèdre de l’Atlas, le libocèdre, le sapin d’Espagne, semblent plus adaptées, mais d’autres arbres comme le calocèdre et des sapins méditerranéens pourraient être testés. Alors, en combinant les origines d’arbres, les couleurs, les formes, peut-être même les odeurs, l'ONF donnera un second souffle à ces ronds typiques en enrichissant ces collections botaniques. Un projet qui s’inscrira dans la dynamique de Tronçais Forêt d’Exception® et qui pourra faire l’objet de mécénat.
Les évolutions climatiques, avec des hivers doux qui favorisent la multiplication des parasites et des étés caniculaires à répétition, ont un impact et fragilisent les arbres. Nous devons prendre en compte toutes les contraintes : le sol, la disponibilité en eau, si d’autres arbres pourront protéger les jeunes arbres le temps de grandi, … Nous étudierons tout cela à partir de cet automne, afin de présenter un avant-projet au comité Tronçais Forêt d’Exception dès que possible.
Des ronds inscrits dans l’histoire de la forêt
C’est à la fin du XIXe siècle que furent créés les carrefours forestiers en Tronçais ou "ronds". Les conservateurs et inspecteurs des Eaux & Forêts les baptisèrent en tenant compte des toponymes locaux (Bouteille, Chers Buissons…), mais aussi pour rendre hommage aux forestiers qui en avaient marqué son histoire, comme Buffault, Raffignon… A cette époque, rendre hommage à quelqu’un c’était aussi planter des arbres, et comme le chêne était déjà dominant, les forestiers aménagèrent les ronds en plantant sur leur périphérie des conifères. Il est très probable que les premières espèces forestières résineuses étaient de l’Epicéa commun, des sapins, des pins et le Mélèze. Des espèces moins habituelles furent implantées au XXe siècle, le Douglas, le Séquoia géant et le Cryptomeria du Japon par exemple.
Comment le sait-on ? Et bien tout d’abord par les écrits. Un livret journalier du forestier local nous parle de l’inauguration du Rond Buffault en 1923, dans lequel il y est fait mention de la plantation d’arbres, peut-être bien ces séquoia géants qui dominent aujourd’hui les chênes ! Le comptage des souches d’arbres est une autre source, ainsi sur le Rond du Chevreuil les épicéas étaient âgés de 125 à 140 ans et les sapins d'à peine 70 ans ! Et puis l’iconographie : une vieille carte postale de 1940 de ce même rond nous montre un cercle d’épicéa d’une cinquantaine d’années !
Les ronds de Tronçais font partie de l’image de marque de la forêt. Ils sont pris en compte dans le cadre du label Tronçais Forêt d’Exception®, un plan paysager montre l’intérêt de ces "carrefours forestiers" et souligne l’importance de leur maintien au travers d’une gestion des collections botaniques. Dans ce plan, il était déjà prévu de remettre des arbres sur les ronds les plus emblématiques du massif.