Dans de nombreuses forêts d’Ile-de-France, le constat est le même : le Laurier du Caucase se développe au détriment des espèces locales. Sa présence a divers impacts sur la forêt. Il empêche les autres plantes et petits arbres de se développer et donc à la forêt de se régénérer. Ses feuilles épaisses mettent beaucoup de temps à se transformer en humus. De plus, les îlots de lauriers, qui perdent peu de feuilles en hiver, modifient le paysage forestier.
Pour lutter contre cette invasion, l'ONF pratique l’arrachage. Une méthode alternative qui s'inscrit dans sa politique de zéro produit phytopharmaceutique en forêt publique (herbicides, pesticides, fongicides...). En octobre 2019, en forêt départemantale des Grands Avaux, avec le soutien financier du Conseil départemental de l’Essonne, l’Office a testé deux dispositifs de lutte contre le Laurier du Caucase : l’arrachage mécanique et l’arrachage à cheval.
Le technicien forestier chargé de ces actions a constaté une efficacité complémentaire des deux techniques testées :
- Sur les zones où la présence de Laurier est très dense, la pelle mécanique est plus efficace. Dotée d’une force d’action importante, son bras permet d’arracher des lauriers d’un gros diamètre sans efforts.
- En revanche, sur les zones à dénivelé, avec des accès compliqués ou des sols sensibles, l’arrachage grâce aux chevaux est plus adéquat. Les lauriers écrasés ou coupés sont aussi plus difficiles à arracher. Les chevaux permettent une action plus fine. En suivant le sens d’implantation des racines du Laurier, l’arrachage grâce aux chevaux à la mobilité incomparable, est plus efficace car il retire l’ensemble des racines.
Ces deux techniques ont des résultats similaires en termes de rendement. Après l’arrachage, les lauriers sont broyés en petit copeaux pour assurer qu’aucune reprise ne sera possible : les lauriers broyés ne peuvent plus bouturer. Ainsi, les copeaux peuvent être évacués en plateforme de compostage.
Laurier du Caucase : les raisons du développement
Le Laurier du Caucase (Prunus laurocerasus "Caucasica") est une plante d’ornement couramment utilisée pour la création de haie. Sa présence en forêt empêche le développement de la végétation basse dont les semis forestiers (petits arbres issus de graines). Son implantation en forêt dépend de plusieurs facteurs :
- Les dépôts de déchets verts en forêt : animés par de bonnes intentions, certains usagers pensent que jeter les déchets verts (composés de matière organique) issus de l’entretien d’espaces verts, des jardins permettra d’enrichir les sols grâce à leur décomposition. Or, ces dépôts peuvent au contraire asphyxier les sols, déséquilibrer la composition de l’humus forestier, et favoriser la prolifération de plantes invasives. Le Laurier du Caucase ayant une capacité à faire des racines, chaque branchage issu d’une taille déposé en forêt est une potentielle bouture.
- Les fleurs du Laurier du Caucase produisent des graines dont se nourrissent les oiseaux. Par leurs excréments les oiseaux disséminent ces graines et favorisent l’implantation du Laurier. Il est ainsi conseillé de couper les haies de Laurier du Caucase avant la période de floraison.
Quid des plantes invasives en forêt
Les invasions biologiques représentent la deuxième cause d’appauvrissement de la biodiversité après la destruction des habitats. Des plantes introduites prolifèrent, modifient, voire remplacent les écosystèmes locaux et engendrent la banalisation des paysages. La présence d’espèces végétales exotiques envahissantes en milieu forestier est une réalité prise en compte dans la gestion des espaces forestiers. Plus d’une trentaine d’espèces sont concernées en France métropolitaine, certaines ont une incidence négative sur le développement des jeunes forêts : Rhododendron (Rhododendron ponticum), Buddleia (Buddleja davidii), Renouée du Japon (Fallopia japonica), Faux-vernis du Japon (Ailanthus altissima), Berce du Caucase (Heraclum mantegazzianum), Cerisier tardif (Prunus serotina), Raisin d’Amérique (Phytolacca americana), Laurier cerise (Prunus laurocerasus)…
Bon nombre de ces plantes sont vendues en jardinerie. Lorsqu'elles se retrouvent en forêt, leur prolifération extrêmement rapide est facilitée dans les zones de clairières après les coupes forestières pour l’exploitation du bois et la mise en lumière des parcelles. La régénération des espèces franciliennes comme le hêtre ou le chêne est alors étouffée. Aujourd’hui, des suivis écologiques et diverses actions de lutte, comme l'arrachage, sont menés par l'ONF pour assurer la croissance des arbres autochtones.