La pédologie : un outil fondamental dans l'adaptation des forêts au changement climatique
Qu'est-ce que la pédologie ?
La pédologie est la science qui étudie les couches superficielles du sol. Elle a pour but d’analyser et de décrire les sols avec un certain nombre de paramètres prédéfinis pour répondre à plusieurs questions : quelle est sa composition, sa réserve en eau, sa sensibilité au tassement, etc.
Contrairement à la géologie qui va davantage se concentrer sur l’histoire et l’explication de la nature des sols sur une échelle de plusieurs millions d’années, la pédologie agit sur des temps plus courts pour s’attarder sur l’évolution actuelle du sol.
Chaque sol est constitué de plusieurs couches :
- Les humus : ils représentent tout ce que nous voyons en surface du sol (feuilles et débris végétaux) et détermine le niveau d’activité biologique du sol.
- Les formations superficielles : c’est la couche étudiée car elle accueille toutes les évolutions et distinctions du sol (liés à l’activité de la faune du sol, le gel, le ruissellement, etc). On en distingue principalement plusieurs types. Par exemple, en Normandie nous retrouvons :
- Le sol limoneux est principalement dû à des dépôts éoliens de limon dans le temps. Nous le retrouvons par exemple sur les forêts domaniales de Lyons, d’Eu, d’Eawy ou d’Arques.
- Le sol sableux est constitué lui, de dépôts de sable apportés par les méandres de la Seine. Nous le retrouvons notamment dans les forêts domaniales de Roumare (sud) et de Brotonne (Nord).
- Les formations à silex comportent une certaine quantité d’éléments grossiers comme des cailloux. Nous le retrouvons un peu partout, dans les forêts avec vallées et versants. Face au changement climatique, ce type de sol est particulièrement sensible.
- Le matériau parental : il représente la dernière couche, souvent composée de roches.
A quoi sert la pédologie ?
L’étude des sols est essentielle :
- pour la sélection des essences les plus appropriées à chaque type de sol. Par exemple, si nous avons un sol sableux, les essences qui peuvent y vivre le mieux seront des chênes ou des pins. Si nous avons a contrario un sol limoneux riche, nous préfèrerons des feuillus comme le hêtre ou le chêne sessile.
- pour la connaissance des réserves en eau des sols. Cette donnée est primordiale à prendre en compte pour adapter les forêts au changement climatique.
Comment étudie-t-on un sol ?
Pour étudier un sol, nous faisons des prélèvements en forêt afin de voir et toucher les matériaux qui le composent, explique Vincent Parchemin, chargé de sylviculture et référent pédologie à l'agence de Rouen. Le prélèvement du sol est principalement fait avec une tarière (voir photo) : un trou d’un mètre environ va être creusé afin d'extraire et observer les différentes couches citées ci-dessus. Le prélèvement est ensuite remis à sa place. Plusieurs documents généraux ont été créés pour faciliter la reconnaissance de chaque couche et matériaux afin de définir au mieux les essences à planter.
Plusieurs processus complémentaires peuvent être réalisés : par exemple, de l’acide chlorhydrique peut être déposé sur une partie rocheuse afin de savoir si elle est riche en calcaire ou non.
en s'appuyant sur une étude pédologique réalisée en août 2023 en forêt domaniale d'Eawy, en Normandie
Par exemple, ici, sur un point précis de la forêt domaniale d'Eawy (Normandie), nous avons un sol qui est composé à 30% de silex. C'est un sol limoneux relativement profond supérieur à 1m. Le gestionnaire se concentrera sur les chênes, plus résistants face au changement climatique. Le mélange d'essences, qui augmente la résilience d'une forêt, est toujours ciblé. Des châtaigniers, alisiers, merisiers sont également adaptés à cette station.
Une forêt résiliente face aux aléas climatiques (sécheresses plus fréquentes, feux de forêts, tempêtes..) est une forêt mélangée. Au quotidien, les forestiers de l'ONF travaillent pour favoriser cette diversité.
La pédologie : une science qui permet d’appréhender l’état des forêts face au changement climatique
Etudier le sol fournit des informations importantes pour installer de nouvelles essences plus résistantes au changement climatique. En effet, certaines d’entre elles risquent de ne plus être adaptées selon les scénarios d’évolution du climat du GIEC.
L’autre élément important à prendre en compte lorsque l’on parle de sol et de changement climatique, ce sont les réserves en eau. La pédologie va nous permettre de déterminer la capacité du sol à retenir l’eau dont les plantes ont besoin. On pale alors de réserve utile et de réservoir utilisable. La réserve utile représente la totalité de l’eau contenue dans le sol. Le réservoir utilisable correspond à l’eau utilisable directement par les plantes.
Afin d’anticiper les risques de sécheresse dans les sols les plus exposés, l’enjeu est d’appréhender au plus juste le réservoir utilisable en diversifiant les forêts et en installant des essences plus adaptées au climat changeant.