En forêt de Fontainebleau, l'ONF entretient la lande sèche des Couleuvreux
En novembre dernier, les ouvriers de l’Office national des forêts (ONF) ont réalisé une coupe de jeunes pins sur la lande sèche des Couleuvreux, située dans la réserve biologique dirigée (RBD) de la Haute Borne.
Aidés par les jeunes du 2e Régiment du Service Militaire Volontaire de Brétigny-sur-Orge qui, en ce début d’année, sont venus retirer les branches et branchages mis en tas sur place après l’intervention.
Par ces actions, l’ONF entend ralentir la dynamique naturelle de boisement afin de conserver la bruyère cendrée et la callune. Caractéristiques de cet écosystème, ces plantes offrent gîte et couvert à de nombreuses espèces emblématiques.
Bien que reconnues comme habitat d’intérêt européen (Natura 2000), les landes se raréfient en Île-de-France. Sans entretien, la végétation s’y développe, laisse place à un fourré (prunelier, aubépines…), puis les arbres se développent, finissant par faire disparaître les landes et leur biodiversité singulière.
Ces milieux remarquables indispensables à la sauvegarde de nombreuses espèces (oiseaux, reptiles, libellules…) nécessitent une gestion conservatoire. Outre leur valeur écologique forte, elles présentent aussi un intérêt paysager et culturel. Raison pour laquelle l’ONF les restaure.
C’est particulièrement le cas dans le massif de Fontainebleau où les milieux ouverts s’étendent sur près de 1 500 hectares, classés en réserves biologiques dirigées.
La valeur écologique des landes menacée
La nature ayant horreur du vide, par la croissance des végétaux, elle occupe tout l’espace disponible. Pour la biodiversité, cette dynamique naturelle n’est parfois pas sans conséquence. Les landes sèches abritent plusieurs espèces végétales et animales spécifiques. C’est-à-dire que ces espèces en dépendent et ne peuvent pas vivre ou se reproduire dans d’autres endroits.
Figurent parmi elles des oiseaux comme l’Engoulevent d’Europe, la Fauvette pitchou, le Pouillot fitis ou encore l’Alouette lulu. Ces trois derniers sont considérés "en danger" sur la liste rouge régionale des oiseaux nicheurs en Île-de-France.
L’intérêt naturaliste de la lande se mesure aussi par la forte abondance de plantes rares comme l’Hélianthème en ombelle, l’Orobanche des genêts mais aussi quelques autres espèces assez particulières au massif de Fontainebleau : le Genêt ailé et la Laîche des bruyères.
La Fauvette pitchou, un petit oiseau, se reproduit uniquement en milieu ouvert. Sa reproduction devient impossible lorsque le milieu se boise. D’après un inventaire réalisée en 2019 par l’ONF et l’association des naturalistes de la vallée du Loing et du massif de Fontainebleau dans le cadre de Natura 2000, on compte aujourd’hui moins de trente couples sur le massif de Fontainebleau, seul massif en Île-de-France où l’espèce subsiste toujours. La conservation des landes constitue une priorité forte pour la survie de cet oiseau rare.
Des travaux indispensables pour ces milieux
Conserver le bon état écologique des landes est une priorité pour l’ONF. Cela implique des travaux réguliers de la part des forestiers. Du simple arrachage manuel, au débroussaillage lorsque la végétation est basse en passant par des coupes dès que les arbres sont trop hauts, les interventions varient selon les situations.
Enfin, sur certains sites, l’ONF recourt à l’éco-pâturage. Un contrat Natura 2000 a été établi avec un berger. Chaque année, entre avril et septembre, environ 300 moutons pâturent en forêt domaniale de Fontainebleau. Une itinérance de parcelle en parcelle qui couvre 200 hectares de landes et pelouses sèches.
Cependant, le pâturage n’étant plus efficace lorsque les arbustes sont trop denses ou que les arbres sont trop hauts, les interventions mécanisées sont nécessaires.
Les travaux de restauration en images
Deux questions à Julien Simon , chef de projet biodiversité à l'agence ONF Île-de-France Est
Que se passerait-il si aucune coupe n’avait lieu sur la lande sèche des Couleuvreux ?
Historiquement, les landes étaient entretenues par l’action humaine, le pâturage notamment. Sans intervention, les pins se développeraient jusqu’à ce que la lande se reboise et devienne une forêt. Nous perdrions les espèces typiques qui ne pourraient plus se reproduire. La rareté de cet habitat et le rôle qu’il joue dans la sauvegarde d’espèces rares nous conduisent à stopper le développement de la végétation. Lorsque les pins atteignent une certaine hauteur, seule la coupe nous permet d’atteindre cet objectif.
Est-ce que cela se fait au hasard ?
Gérer ces milieux repose sur des suivis scientifiques et naturalistes précis réalisés par l’ONF et ses partenaires comme l’association des naturalistes de la vallée du Loing et du massif de Fontainebleau (ANVL) et le conservatoire botanique national. Leur restauration s’avère une entreprise complexe. Les expériences montrent qu’il est important de bien réfléchir aux interventions (nature, période, techniques), au risque de ne pas améliorer l’habitat. Rien ne se fait au hasard, au contraire, nous nous appuyons sur une feuille de route qui préconise les actions à mener en fonction des enjeux écologiques.