A la découverte des amphibiens des mares de Marly
La forêt est une source de vie pour de nombreuses espèces animales et végétales, c’est un environnement fragile à préserver. Les milieux humides font partie intégrante du milieu forestier et sont de véritables sources de biodiversité.
Le changement climatique et ses impacts sur les milieux humides (une problématique commune au milieu forestier)
Avec le changement climatique, les mares sont fortement impactées par la sécheresse et la hausse des températures. De nombreux points d’eau se retrouvent à sec, mettant en péril plusieurs espèces de batraciens, d’insectes aquatiques (libellules, coléoptères, etc.) mais aussi de végétaux.
L’Office national des forêts, dont l’une des trois grandes missions est de préserver la biodiversité dans les milieux forestiers, veille à la conservation de zones humides et de leur faune inféodée.
Le dérèglement climatique est la cause de beaucoup de réflexions et de projets initiés dans les forêts. En ce qui concerne les mares, des plans de gestion sont établis afin de suivre ces milieux et mener des actions afin de favoriser cette biodiversité, tout en limitant autant que possible les conséquences du changement climatique, notamment la sécheresse.
La mise en marche du plan de gestion des mares
En forêt domaniale de Marly, un plan de gestion des mares a été mis en place. Dans un premier temps, un état des lieux a été réalisé permettant d’orienter les actions des forestiers et d’établir une stratégie en planifiant les différents travaux et leur suivi afin de conserver au mieux ces écosystèmes.
Au cours de l’automne 2022, des travaux de génie écologique ont été ainsi effectués sur une dizaine de mares dans le cadre du Plan de Relance 2021-2022. Ces travaux ont consisté à mettre en lumière trois mares ou à curer avec précaution et souvent qu’en partie 8 mares très envahies de vases : ceci permettant un apport de lumière et surtout de restocker de l’eau, indispensable à la faune et à la flore inféodées à ces milieux aquatiques. Dans le même cadre de ce plan de gestion, un inventaire effectué par des naturalistes a été réalisé.
Un inventaire effectué au fil de l'eau !
Les travaux de génie écologique sont effectués afin de favoriser la biodiversité de ces milieux humides. Les mares, si elles ne sont pas entretenues, s’assèchent progressivement, puis durablement, affectant directement la faune et la flore de ces milieux parfois très riches. Pour déterminer si l’impact de ces travaux a été bénéfique aux amphibiens, un suivi a été confié à deux herpétologues de l’ONF. Ils ont observé les amphibiens durant la saison de reproduction, en inventoriant les pontes, les larves, les adultes, se succédant dans les mares, durant le printemps 2023. Ils regardent à la fois dans l’eau mais aussi le milieu terrestre environnant où se tiennent les adultes et les juvéniles. Car les amphibiens sont des animaux essentiellement terrestres, qui ne viennent à l’eau que pour une très courte période.
Le premier passage, réalisé en mars 2023, a permis d’établir une première liste. A cette période, il s’agit des espèces précoces (Grenouille rousse et agile, Salamandre). Toutes les espèces ne se reproduisant pas en même temps, il était donc indispensable de repasser plusieurs fois sur chaque mare.
Pour le deuxième passage en mai 2023, ce sont surtout les tritons qui sont recherchés, grâce à la recherche à vue, de nuit, à l’aide de lampes en éclairant les berges, ainsi que par la pose de nasses passives. Ces nasses posées en fin de journée, sont relevées dès le lendemain matin. Elles permettent de capturer temporairement les tritons, sans les mettre en danger, et sans nuire à l’écosystème. C’est grâce à ce deuxième relevé, qu'à pu être mis en évidence le retour à l’eau des tritons palmés, alpestres et crêtés. Ainsi que l’apparition de grenouilles vertes, qui n’étaient pas connues jusqu’alors.
Le troisième passage a pour objectif d’établir si la reproduction des amphibiens a fonctionné. Les relevés se concentrent sur le prélèvement de larves (têtards) à l’aide d’une petite épuisette d’alevinage (non destructrice pour le milieu). C’est un moyen de trouver des espèces parfois passées inaperçues lors des deux premiers passages. Ce dernier relevé permet de constater que la reproduction a abouti sur plusieurs mares. Cependant, pour certaines, malgré les travaux, le manque de précipitations a provoqué un assèchement trop précoce, hypothéquant la survie des larves. En outre, on constate la lente recolonisation de plantes aquatiques, au sein de mares qui étaient à sec depuis plusieurs années.
Les résultats ont montré qu’une dynamique naturelle s’est remise en route : l’eau est plus présente qu’auparavant, la végétation caractéristique de ces milieux revient progressivement. Ce qui permet d’améliorer la qualité du biotope des amphibiens et des insectes aquatiques. Des émergents sont trouvés sur les berges, prouvant le succès de la reproduction, selon les mares.
Ces trois passages ont permis l’observation de 8 espèces à différents stades de leur évolution : ponte, larve, juvénile et adulte. Cela montre que ces milieux humides, grâce aux travaux mis en place par les forestiers, continuent de favoriser la biodiversité de ce massif.
Découvrir en images un inventaire !
Des résultats encourageants !
Globalement les mares disposent d’une meilleure rétention d’eau qu’elle ne l’était avant les travaux. L’écosystème se revitalise avec la réapparition de végétaux. Et surtout, les espèces anciennement présentes en 2012 sont revues en 2023, à l’exception du Crapaud accoucheur (Alyte). Celui-ci reste certainement présent dans d’autres mares de la forêt de Marly. Le bilan est positif, le curage a permis un succès significatif de la reproduction des amphibiens ainsi qu’un retour progressif de la végétation des mares.
Malgré ces résultats positifs, on note des différences cruciales concernant les niveaux d’eau. Les bienfaits apportés par le curage ne compensent pas les impacts du changement climatique. Certaines mares en eau au premier passage, étaient à sec lors du dernier relevé, par manque de pluies. Les travaux de mise en lumière et de curage permettent aux milieux humides de conserver leur biodiversité. Mais les sécheresses à répétition impactent fortement ces milieux, en particulier ces derniers hivers où le manque d’eau n’a pas permis de recharger ces écosystèmes fragiles.
L’impact est aussi présent sur les inventaires car la phénologie des amphibiens évolue. En effet, les créneaux de pontes et d’émergences des espèces se décalent. Cette année, l’hiver a été plus doux, donc la reproduction a commencé plus tôt mais au moment de la ponte les mares n’étaient pas assez en eau par exemple. Cela complique la mission des naturalistes qui essaient de déterminer quel est le moment propice pour effectuer leurs inventaires afin d’avoir un bilan le plus représentatif de la réalité.
L’Office national des forêts préserve la biodiversité des milieux humides et d’autres milieux fragiles, qui subissent le dérèglement climatique de manière importante. Les travaux de génie écologique sont un levier pour protéger ces milieux tout en favorisant l’écosystème forestier. Mais ils dépendent étroitement des précipitations. Dès 2024, le suivi sera poursuivi. Et de nouvelles mares seront restaurées durant les cinq prochaines années.