Fontainebleau : l’ONF recourt à l’éco-pâturage pour entretenir des sites écologiquement intéressants
Une fois n'est pas coutume, plus de 300 moutons ont pris leur quartier d’été en forêt de Fontainebleau. D’avril à septembre, les promeneurs se surprennent parfois à les croiser. Il faut dire que leur bêlement et leurs cloches tintinnabulantes n’indifférent personne. C’est depuis 2015 qu’Alexandre Faucher, jeune berger aidé par ses chiens de garde, y installe son troupeau. Un partenariat avec l’ONF l’autorise à faire pâturer ses ovins sur des milieux non boisés, reconnus comme habitat d’intérêt européen par le réseau Natura 2000.
Pour ses moutons, l'espace ne manque pas puisque l’itinérance de parcelle en parcelle couvre près de 200 hectares de landes et de pelouses sèches. Chaque début d’année, l’ONF établit un calendrier précis définissant les dates de passages sur les parcelles en prenant en compte celles des années précédentes : une rotation est nécessaire pour ne pas pâturer les mêmes parcelles à la même période.
En complément des travaux d’entretien mécanisés (broyage, débroussaillage, coupe d’arbre), l’éco-pâturage contribue à « conserver la végétation basse sur les landes et pelouses sèches de la forêt » explique Julien Simon, chef de projet biodiversité à l’ONF. « Les bruyères et callunes qui les composent abritent une faune et une flore spécifiques. Des oiseaux protégés comme la Fauvette Pitchou, l’Alouette lulu et l’Engoulevent d’Europe ne peuvent pas vivre ou se reproduire dans d’autres endroits. Sans entretien, ces milieux se reboisent avec des pins, aubépines et pruneliers finissant par faire disparaître la biodiversité qui en dépend » poursuit-il.
En Île-de-France, la diminution progressive des landes, des prairies et pelouses sèches explique en partie le déclin de ces oiseaux, observé ces dernières années. La rareté de cet habitat et le rôle qu’il joue dans la sauvegarde d’espèces rares nécessitent donc une gestion particulière.
Un pâturage qui fait de l’effet
Dans le massif forestier de Fontainebleau, les milieux ouverts composés principalement de landes et de pelouses s’étendent sur près de 1 000 hectares, classés en réserves biologiques dirigées*. Conserver leur bon état écologique est un enjeu de taille pour l’ONF. Cela implique des interventions multiples et régulières. « Sur les secteurs pâturés, l’ONF souhaite maîtriser la croissance végétative. En consommant les végétaux, les ovins contribuent ainsi à maintenir la richesse de la biodiversité sur ces sites. À ce jour, les résultats sont encourageants. Les suivis montrent une amélioration globale de l’état de ces habitats. En abroutissant et piétinant le sol, ils arrivent à maintenir également une végétation basse. C’est le résultat recherché » précise Julien Simon.
Certaines plantes qui étaient moins nombreuses se sont multipliées, occupant des espaces plus importants. Un suivi annuel de la végétation réalisé par l’Association des naturalistes de la vallée du Loing et du massif de Fontainebleau (ANVL), étudie l’impact du pâturage sur le long terme. Celui-ci se base sur des inventaires de terrain et sur des relevés photographiques. Le Conservatoire botanique national du bassin parisien (CBNBP) chargé par l’ONF de réaliser une étude sur le patrimoine végétal et son état de conservation confirme les effets positifs du pâturage.
Alexandre Faucher et ses brebis travaillent avec l'ONF depuis huit ans. L'automne venu, le troupeau change de pâture.Les bêtes quittent la forêt pour rejoindre les cultures céréalières d’un agriculteur essonniens. Les bactéries qu’elles déposent dans la terre permettre ensuite d’améliorer le rendement céréalier. Un cercle vertueux qui profite tant à la forêt qu’à la plaine agricole.
*Réserves biologiques dirigées (RBD) : espaces naturels où l’on applique une gestion particulière pour la conservation d’espèces ou de milieux naturels rares et vulnérables.
Le développement d’une végétation ligneuse referme progressivement les landes, pelouses et chaos rocheux entraînant une perte de biodiversité : fermeture du milieu par les fourrés, enrésinement, banalisation de la flore, évolution vers des végétations quasi mono-spécifiques (fougères, graminées sociales).