Claude-François Denecourt, le pionner de la randonnée pédestre
Après une enfance passée en Franche-Comté sans avoir reçu d’instruction, Claude-François Denecourt (1788-1875) est enrôlé dans les armées napoléoniennes, puis devient portier-concierge dans une caserne de Fontainebleau (Seine-et-Marne). Destitué à cause de ses idées républicaines, il tombe dans une grave dépression et commence à parcourir la forêt de Fontainebleau : subjugué par la variété et la beauts de ses paysages, il est guéri. Dès lors, il lui consacre tout son temps, son énergie et une grande partie de ses économies pour assurer sa promotion.
A quarante-quatre ans, cet autodidacte veut faire découvrir la forêt aux touristes qui affluent en ville. Editeur de guides et de cartes, il trace en forêt des sentiers balisés de grandes flèches bleues, avec des marches et des murets, afin de conduire les promeneurs vers des lieux inhospitaliers. Jusque-là, la forêt fait peur. On la craint, on l'ignore et on s'en approche seulement pour y trouver des moyens de subsistance.
Tout au long des sentiers balisés, Denecourt propose un parcours culturel et pittoresque. Des lettres peintes sur les arbres et les rochers font référence à la mythologie ou à des personnages du monde artistique ou politique, puis il aménage des édifices de grès le long des chemins : fontaines, grottes et une tour d’observation, appelée maintenant Tour Denecourt.
Le désensablage des grottes, l’ouverture de tunnels et la création de sites pittoresques fondés sur des légendes créées de toutes pièces, comme la caverne des Brigands, lui valent les attaques d’artistes très présents sur Fontainebleau qui lui reprochent de dénaturer la forêt. Il gagne cependant les faveurs de la bourgeoisie citadine à la recherche de naturalité.
D’autant que l’arrivée du chemin de fer en 1849 rend la forêt Fontainebleau plus accessible et la popularise. La forêt s’ouvre alors aux promeneurs et devient un lieu de visite très apprécié par les Franciliens.
En 1855, quarante-deux écrivains composent un livre d’hommage à Denecourt, avec un poème de Théophile Gautier intitulé "Sylvain", surnom qui sera désormais le sien. Sa notoriété s’accroit, bientôt les plus grands écrivains comme Victor Hugo, Lamartine, Alfred de Musset ou encore Georges Sand lui rendent hommage.
Sans le savoir, Denecourt créé les premiers sentiers pédestres balisés au monde (150 km). Son travail a ensuite été poursuivi par son disciple Charles Colinet (de 1875 à 1905) suivi par sa femme Maria Colinet (de 1905 à 1921), dans le même esprit, avec plus de 100 km de nouveaux sentiers. Si après la Seconde Guerre mondiale, n'ayant pas été entretenus, la question de les maintenir ou non s'était posée, ils perturent aujourd'hui. Ces sentiers sont ceux qu'empruntent encore des milliers de promeneurs.
La tour Denecourt, une curiosité incontournable de la forêt de Fontainebleau
Sur le sommet du rocher Cassepot, trône la tour Denecourt. Inaugurée par Napoléon III en 1853, elle s’écroula, puis fut reconstruite par Colinet grâce à une souscription publique. Réhaussée de plus d’un mètre, elle offre un panorama incontournable sur la forêt, avec la ville de Paris sur la ligne d’horizon.
Au fil du temps, l’érosion fragilise le monticule et les murets en grès. Aujourd’hui grâce aux travaux réguliers entrepris par l’ONF (lutte contre l’érosion, réfection des murets, rénovation du chemin d’accès, ouverture de points de vue), cet endroit reste l’un des points d’orgue de la forêt de Fontainebleau.
L’Office national des forêts (ONF) gestionnaire de cette forêt domaniale, entend conserver ce patrimoine culturel remarquable. Pour cela, il s’appuie sur l’association des Amis de la forêt de Fontainebleau qui assure l’entretien courant de ces itinéraires, ainsi que ceux qui ont été ajoutés ultérieurement. Leur description est parfaitement documentée sur le guide des sentiers de promenade édités par cette association.
Le tourisme de nature est né et se développe en France à partir de Fontainebleau...