Les forêts de Fontainebleau et des Trois-Pignons observées à la loupe pour suivre leurs évolutions

C’est un inventaire colossal, qui se répète tous les 10 ans dans les forêts de Fontainebleau et des Trois-Pignons. Les forestiers de l’ONF scrutent les arbres et passent au crible de nombreuses données, avec l’objectif de connaître leur évolution et de contrôler les effets de la gestion. La méthode utilisée consiste à mesurer un réseau de 479 placettes permanentes.

Produire des statistiques précises et objectives à l’échelle des forêts et les comparer dans le temps, c’est possible. Différentes méthodes d’inventaire existent. L’une d’entre elle consiste à collecter des données sur les arbres. A l'aide de placettes permanentes, repérées précisément dans l’espace et étudiées tous les 10 ans, quelques mesures suffisent à transformer un arbre en données statistiques.

Dans les forêts de Fontainebleau et des Trois-Pignons, 479 placettes d’inventaire couvrant chacune une surface de 700 m2 font l’objet d’un inventaire de terrain jusqu'en juin. En suivant un protocole précis, les forestiers y recueillent une quantité impressionnante d’indicateurs. De la description des arbres vivants sur pied aux relevés environnementaux en passant par l’observation du renouvellement et de l’état sanitaire de la forêt, rien n’est laissé au hasard. Des informations précieuses pour agir et construire durablement leur avenir.

©Milena Vasconcélos / ONF

Observer, mesurer et décrire les peuplements forestiers

Schéma d'une placette permanente - ©Guillaume Larrière / ONF

Tablette pour la saisie des données, boussole, vertex et compas forestier en main, les agents, organisés par équipe de deux, repèrent et identifient les arbres suivant leurs coordonnées polaires : distance au centre de la placette et azimut.

« Sur chaque placette, nous recensons tous les arbres de plus de 7.5 cm de diamètre, mesurons leurs mensurations notamment les diamètres, relevons les essences présentes ainsi que la qualité des bois. Puis, nous observons les conditions favorables au renouvellement de la forêt. C’est-à-dire la présence ou non de semis au sol qui vont grandir et devenir la forêt de demain » précise Charlotte Bouchaud, chargée de sylviculture à l’agence Île-de-France Est de l’ONF.

A cela s'ajoutent d’autres mesures portant sur le bois mort, les dendro-micro-habitats (cavités, champignons, écorces décollées…) sur les arbres vivants, la présence de régénération des essences de production comme les chênes ou, inversement, celle d’espèces exotiques envahissantes et menaçantes.

©Milena Vasconcélos / ONF

Les mêmes données remesurées tous les 10 ans

L'échantillonnage extrapolé à l’échelle du massif apporte une photographie fidèle du patrimoine forestier. Non seulement cette méthode très complète dresse un état des lieux des forêts mais elle permet surtout de suivre leur évolution dans le temps. C'est un travail qui s'inscrit dans le temps long. « Nous repassons sur les mêmes points, tous les 10 ans, en relevant les mêmes données statistiques ». 

Dans les forêts de Fontainebleau et des Trois-Pignons, l’installation du réseau de placettes remonte à 2014. La première série de mesures sert à estimer le patrimoine forestier (structure du peuplement, volumes par essence, qualité, classe de diamètre) ainsi que la dynamique du renouvellement.

Dix ans plus tard, les forestiers remesurent le même dispositif. Ainsi « En comparant les mesures prises en 2024, qui correspondent à une photographie de la forêt à un instant T, avec celles de 2014, nous allons voir comment la forêt a poussé et l’effet de la gestion sur celle-ci. Est-ce qu’elle a permis d’améliorer la qualité des arbres ou encore de renouveler la forêt ? C’est l’objectif recherché puisque la finalité de notre gestion est d’assurer sa pérennité » souligne Nicolas Laurent, responsable de l’unité territoriale de Fontainebleau.

©Milena Vasconcélos / ONF

Face au changement climatique, les forêts sont en première ligne « Nos descriptifs ne cessent de s’enrichir. Pendant les relevés, nous scrutons également les signes inexpliqués de dépérissement sur les arbres, liés ou non aux effets du changement climatique. Croisés avec d’autres suivis scientifiques, ces paramètres nous aident à prendre les meilleures décisions » poursuit-il.

Centralisées dans une application mobile, toutes les mesures sont ensuite vérifiées, triées et analysées. Les résultats de cette remesure sont attendues d’ici la fin de l’année 2024.

©Milena Vasconcelos et Guillaume Larrière / ONF

Suivre et contrôler la gestion forestière : des objectifs multiples

Les remesures successives d’un réseau statistique de placettes permanentes visent à :

  • Identifier l’évolution de la composition de la forêt (mélange d’essences), de sa structure (répartition des classes d’âge et de diamètre) ainsi que de son capital.
  • Connaître précisément la production biologique de la forêt, c’est-à-dire la quantité de bois produite durant les 10 dernières années. Cette donnée prend en compte :
    • L’accroissement des arbres déjà comptabilisés durant la précédente mesure : différence de diamètre entre les deux mesures
    • Les arbres non mesurés précédemment qui atteignent le diamètre minimum de comptabilisation (7,5 cm)
    • Les arbres mesurés initialement et absents lors de la série suivante, soit parce qu’ils ont été exploités, soit parce qu’ils sont morts naturellement ou à cause d’événements biotiques ou abiotiques exceptionnels (tempêtes, incendies, parasites…).
  • Confirmer ou infirmer la dynamique de renouvellement des peuplements forestiers : taux de présence de semis.