Réserve biologique intégrale des Gorges de la Frau

Les Gorges de la Frau sont creusées dans le plateau calcaire du Pays de Sault par l'Hers, un cours d'eau intermittent appelé aussi ruisseau de la Frau. Orientées selon un axe sud-ouest / nord-est, les gorges font une frontière naturelle entre les départements de l’Ariège et de l’Aude.

La réserve biologique intégrale des Gorges de la Frau se trouve sur le versant audois des gorges, entre 640 m dans le fond de la vallée de l'Hers et 1610 m au Sarrat de Rouquières ; elle est exposée principalement au nord-ouest. En raison des pentes escarpées et d’un accès difficile, elle abrite des forêts subnaturelles (ou "vieilles forêts") d’une grande valeur biologique.

Le réserve est incluse dans la ZNIEFF de type 1 "Gorges de la Frau", faisant elle-même partie de la ZNIEFF de type 2 "Grand plateau de Sault". Elle fait partie du réseau  Natura 2000 au double titre de la ZPS "Gorges de la Frau et Bélesta" et de la ZSC "Garonne, Ariège, Hers, Salat, Pique et Neste". Le fond des gorges de la Frau fait partie d'un site classé depuis 1944.

La forêt de la Plaine Comus est domaniale depuis le début du 19e siècle. Le site de la future RBI des Gorges de la Frau était déjà boisé à cette époque et peut donc être considéré comme de la forêt ancienne. 

En 1816, une coupe de taillis de hêtre a lieu dans la partie sud, probablement pour faire du charbon, comme en témoignent de nos jours des traces de charbonnières. Vers 1830-1840, un incendie détruit une grande partie de la forêt. Par la suite, la dernière coupe connue date de 1890, tandis que les parties les plus abruptes de la forêt semblent avoir été inexploitées depuis des temps immémoriaux. Ainsi, le site a développé un niveau de naturalité qui a notamment été relevé par une étude du WWF sur les forêts les plus remarquables des régions méditerranéennes et des montagnes limitrophes.

La RBI des Gorges de la Frau  se situe sur les terrains secondaires qui forment le socle du Front nord-pyrénéen. Le substratum est essentiellement composé de calcaires durs urgoniens, formant notamment les falaises, et secondairement de marnes de l’Aptien.

Les sols vont du lithosol pour les plus superficiels au calcosol pour les plus profonds sous forêt. Il sont souvent peu développés, à cause de la forte pente et de l'érosion.

La réserve se trouve aux étages collinéen et montagnard. Cet étagement altitudinal, la diversité des reliefs et des expositions génèrent une importante diversité des habitats naturels. 

Les habitats forestiers couvrent environ 70% de la surface de la réserve. La chênaie pubescente (CB : 41.711) se trouve principalement à l’étage collinéen, en stations chaudes et sèches, et monte jusqu’à 1100 m d’altitude environ. Au-delà, elle laisse place à la hêtraie-sapinière calcicole mésoxérophile (CB : 41.16 – N2000 : 9150) sur les rendosols caillouteux, ou à la hêtraie-sapinière pyrénéenne neutrocalcicole mésophile (41.141) en stations plus fraîches. De même, selon l'exposition, sur éboulis des hauts de pente et pieds de falaise des étages collinéens et montagnards inférieurs, on trouve des tillaies sèches à Buis (41.45 – 9180*) ou des forêts à Frêne et Erable sycomore (41.41 – 9180*). En remontant la vallée, sur le bord du ruisseau intermittent, se développe une étroite ripisylve à Frêne et Aulne (44.32 – 91E0*).

Les milieux ouverts de la réserve se composent principalement d’éboulis calcaires secs (61.3122 – 8130) ou frais (62.3123 – 8210). Ils se trouvent sous les falaises qui découpent d’est en ouest la réserve et se rencontrent souvent en mosaïque avec des formations stables à Buis (31.82 – 5110) et à chênaie pubescent. On trouve aussi des groupements de végétation de falaises et des pelouses sèches sur le rebord de celles-ci.

La flore vasculaire n'est pas l'intérêt principal de la réserve des Gorges de la Frau, mais elle est diversifiée et partagée entre les milieux ouverts et boisés. L'Hormatophylle des rochers (PN) est une espèce rupestre qui n'est pas affectée par la dynamique de la végétation forestière. Le Cynoglosse d'Allemagne, espèce forestière rare, et la Doradille verte, qui pousse sur les rochers ombragés, sont montagnardes et apprécient les ambiances forestières relativement fraîches.

La RBI des Gorges de la Frau abrite une forte quantité de bois mort, constituée principalement d’arbres de gros diamètres, ce qui lui confère un caractère particulièrement intéressant pour l’entomofaune saproxylique. Une première prospection a permis de mettre en évidence des espèces de Coléoptères rares à très rares au niveau national (voire européen) : Peltis grossa et Acanthocynus reticulatus, dont la présence laisse présager celle d’autres espèces remarquables.

Parmi les reptiles et amphibiens, ont été trouvés le Lézard des murailles (PN, DH4), l'Orvet (PN), la Vipère aspic et la Salamandre tachetée (PN).

Les rapaces sont bien représentés avec notamment l’Aigle botté, le Faucon pèlerin, le Vautour fauve, le Vautour moine et le Circaète Jean-le-Blanc, les oiseaux forestiers avec le Pic noir et la Chouette de Tengmalm (PN, DO1). 

L'objectif principal de la RBI des Gorges de la Frau est le maintien de la libre expression de la dynamique des habitats naturels, à l'œuvre depuis déjà environ un siècle. L’intérêt premier du site est la forte maturité des peuplements, la quantités de bois mort sur pied ou au sol, ainsi que les arbres de gros voire très gros diamètres, sources d’habitats pour de nombreuses espèces forestières. 

La gestion de la RBI consiste principalement en des études. Le site de la réserve, est escarpé, peu accessible, ne comporte pas de sentiers et il est exclu d'en aménager.