Il n'est pas rare pour les promeneurs de trouver au détour d'un sentier un panneau qui indique "Chantier en cours". De loin, on aperçoit de drôles d'engins que l’on imagine plus destinés au BTP qu’à l’entretien de la forêt. Pourtant, ils sont conçus spécialement pour les travaux forestiers. En images, découvrez un chantier en forêt domaniale de l’Abbaye de Marcenat (Allier).
L’hiver, saison de prédilection pour les travaux d’entretien en forêt de plaine
Les machines permettent le port de charges lourdes tout en limitant les impacts au sol. Maniables dans un environnement restreint, elles facilitent et rendent le travail des bûcherons plus sûr et moins pénible.
Des consignes en fonction des particularités de la forêt
Avant de commencer, le technicien d’exploitation de l’ONF et l’entrepreneur valident tous les points du chantier :
- les mesures de précaution à prendre pour le sol, les arbres à cavités pour les oiseaux, les vestiges archéologiques ou encore le matériel nécessaire pour franchir un cours d’eau sans l’abîmer ;
- les différents produits qui seront tirés de l’arbre : les billons (section de tronc ou de branche de longueur fixe) ont des usages différents suivant leur diamètre et leur longueur : charpente, fabrication de palettes, trituration (bois transformés dans des usines de pâte à papier ou de panneaux OSB)…
- l’information du public et des autres usagers ;
- les points de sécurité (zones où le portable passe pour appeler les secours).
L’abatteuse permet de couper, d’ébrancher et de tronçonner l'arbre
Aurélien a créé son entreprise "Travaux forestiers Guillemeau" il y a 10 ans. Pour cette abatteuse dernier cri, il a investi 420.000 euros. Cette dernière abat, ébranche, coupe en tronçons. Le bois est prêt à être débardé (enlever de la parcelle). Un seul homme fait ce travail en moins de 2 minutes par arbre grâce à cette machine. Mais attention, Aurélien ne coupe que les arbres désignés par le technicien de l’ONF. "Aujourd’hui les périodes d’exploitation ont été réduites à cause des mesures environnementales (hors nidification des oiseaux par exemple) ou parce que la forêt accueille un public nombreux dans les zones touristiques. Du coup, le temps pour réaliser notre chiffre d’affaires est réduit ; les machines nous aident à travailler avec les rendements et la sécurité nécessaires", explique Aurélien.
Des cloisonnements évitent de pénétrer dans la parcelle
Des cheminements, appelés "cloisonnements forestiers" sont créés tous les 20 mètres pour permettre des interventions sans pénétrer dans la parcelle, afin de limiter le tassement du sol et les cassures aux arbres. L’implantation des cloisonnements d’exploitation est réfléchie par rapport aux accès à la parcelle, aux places de dépôt de bois, aux obstacles divers (ruisseaux, vestiges archéologiques…), à la préservation de la flore et à la sensibilité des sols. Ces cloisonnements servent également aux animaux qui trouvent-là des couloirs bien pratiques pour se déplacer et profitent de l’apport de végétation basse pour se nourrir.
Un an d’expérience sur le terrain est nécessaire pour manier l’engin avec habileté
"Les Finlandais ont coutume de dire qu’un bon conducteur d’abatteuse est aussi dur à former qu’un pilote d’avion", sourit Aurélien. C’est vrai qu’une fois dans la cabine, on est impressionné par le tableau de bord complexe.
Si la machine est grosse, elle reste maniable. Précision et concentration sont de mise. "Grâce aux joysticks et à quelques boutons, je commande du bout des doigts une tête d’abattage fichée au bout d’un bras hydraulique qui se déploie jusqu’à l’arbre. Le tout peut couper un tronc jusqu’à 50 cm de diamètre. La tête va soulever des arbres qui peuvent aller jusqu’à 1,5 tonne !" continue-t-il.
Un bras articulé permet de couper l’arbre sans pénétrer dans la parcelle
Cette photo est prise à travers les fenêtres blindées de la cabine : interdiction de sortir, ce serait trop dangereux ! Le bras hydraulique peut s’étendre jusqu’à 10 mètres.
Une fois ébranché, le tronc est sectionné en billons
Le tronc de l’arbre est sectionné en billons. La partie la plus proche de la souche est la plus grosse en diamètre. Cette section fournira de la charpente. Au fur et à mesure que le tronc s’amenuise, les billons serviront à la fabrication de palettes et enfin à la trituration (broyage). Les branches resteront dans la parcelle. Leur décomposition permettra d’enrichir l’humus et nourriront les arbres au profit desquels la coupe a été réalisée.
Pour chaque chantier, les différentes données relatives aux sections des billons sont entrées dans l‘ordinateur. Au fur et à mesure des découpes, celui-ci propose, suivant les différents diamètres, un premier tri. Le pilote valide ou non la proposition. Le billon est ensuite posé à terre suivant son diamètre et l’ordinateur calcule et mémorise le volume de bois. Il n’y aura plus qu’à venir ramasser avec le porteur les tronçons de bois ainsi triés par qualité.
Le porteur dispose de 8 pneus de 71cm de large. En répartissant ainsi le poids, le tassement du sol est limité.
"Après le chantier, le technicien de l’ONF vient faire un état des lieux de la parcelle et de la voierie forestière. En cas de dégâts, nous avons quelques mois pour réparer la route ou le chemin afin de réaliser la remise en état dans de bonnes conditions météos. Le public est très sensible aux ornières. Quelque fois il nous apostrophe en disant que nous détruisons la forêt. Pourtant après la remise en état, il ne faudra qu’un ou deux mois pour que le chemin retrouve son allure. C’est avec nos machines que nous entretenons la forêt aujourd’hui, personne ne voudrait revenir en arrière et exercer le métier comme il y a 50 ans. Les gens qui nous interpellent, eux non plus ne voudrait pas vivre comme dans les années 60", philosophe Aurélien.
Des tonnes de bois sont déchargées du bout des doigts
Dans la cabine, Albert pilote le bras hydraulique pour sortir le bois de la parcelle puis l’entreposer en tas au bord des routes forestières. Ici aussi, il faut avoir de la dextérité et de la concentration. "L’ordinateur de bord me permet régler et de contrôler tous les éléments de la grue. Avec le joystick je dirige le bras de la grue, je commande l’ouverture et la fermeture du grappin", explique Albert.
Pour conduire un porteur de plusieurs tonnes, la caméra est un outil indispensable. Elle permet de se placer en toute sécurité dans l’environnement et d'être précis même si la vue n’est pas dégagée. Rappelons qu’un chantier forestier reste interdit au public. En forêt, les promeneurs doivent rester attentifs à la signalisation.
Après le chantier, le forestier fait un état des lieux de la parcelle et de la voirie forestière. En cas de dégâts, nous avons quelques mois pour réparer la route ou le chemin et réaliser la remise en état dans de bonnes conditions météorologiques. Le public est très sensible aux ornières. Quelquefois, il nous apostrophe en disant que nous détruisons la forêt. Pourtant, après la remise en état, il ne faudra qu’un ou deux mois pour que le chemin retrouve son allure. C’est avec nos machines que nous entretenons la forêt aujourd’hui, personne ne voudrait revenir en arrière et exercer le métier comme il y a 50 ans.
Aurélien,
exploitant forestier pour l'entreprise "Travaux forestiers Guillemeau".