Unique en Europe : la réserve des Beaux-Monts et des mares Saint-Louis

Au cœur des 14 400 hectares de la forêt domaniale de Compiègne (Oise), les 160 hectares de la réserve biologique des Beaux-Monts et des mares Saint-Louis hébergent 1 091 chênes plantés à la fin du XVIe siècle et constitue un trésor du patrimoine forestier français.

Le 18 mars 2023, Bertrand Wimmers, directeur de l'agence de Compiègne de l'ONF, les élus du territoire et les nombreux partenaires ont célébré la future réserve des Beaux-Monts et des mares Saint-Louis, et inauguré le sentier du Pic Mar.  Une réjouissance pour tous de voir enfin aboutir 20 ans de concertation. L'occasion également de revenir sur le caractère unique de ce fleuron du patrimoine européen de par ses richesses forestière, écologique, culturelle et paysagère.

Cinq siècles nous contemplent !

En 1547, les moines de l’abbaye de Saint-Corneille plantent des chênes sessiles sur une centaine d’hectares. C’était il y a plus de 475 ans…

Plus tard, Napoléon III fait classer le site en série artistique, ce qui permettra la conservation de cette chênaie déjà très âgée. Il fait également prolonger l’avenue des Beaux-Monts et crée, avec la route Eugénie, un véritable parcours touristique à travers les sites les plus remarquables.

Le caractère monumental des chênes leur vaut d’être conservés par les différentes générations de forestiers et les six aménagements successifs depuis 1887. Ces chênes arrivés jusqu’à nous cohabitent avec des hêtres bicentenaires pour former un peuplement reconnu au niveau international auquel est associée une biodiversité exceptionnelle inféodée aux vieux arbres.

Les Beaux-Monts constitue également et tout autant un site phare et emblématique de la vie compiégnoise, particulièrement fréquenté et apprécié des habitants et des visiteurs : la carte postale de la forêt en quelque sorte !

L'allée des Beaux-Monts s'étend sur près de 4 km. Elle n’abrite pas moins de quatre habitats d’intérêt communautaire, une trentaine d’espèces végétales d’intérêt patrimonial, et de nombreuses espèces végétales protégées. - ©ONF

Un patrimoine biologique exceptionnel

Le recensement des chênes monumentaux réalisé en 2006 a été renouvelé en 2021 : 1 091 chênes ont été dénombrés avec prise de mesures dendrométriques (hauteur, circonférence, présence de cavités…) et évaluation de leur état sanitaire. De nombreux sujets présentent des signes plus ou moins sévères de dépérissement.

La réserve biologique des Beaux-Monts et des mares Saint-Louis en chiffres

La concrétisation d’un long processus de concertation et d’études

Au sein du comité consultatif de la réserve, de 2002 à 2021, les objectifs ont été longuement discutés du fait de la complexité du site liée aux richesses écologique, culturelle, paysagère, forestière et aux enjeux touristiques et de fréquentation du public.

Certains débats furent longs, contradictoires, avec des points de vue toujours intéressants mais parfois divergents sur certaines questions. Par exemple, quels habitats et espèces favoriser? Quels hiérarchisation et arbitrages entre les différents objectifs de la réserve (libre évolution, naturalité et accueil du public, sécurité des usagers)? Quelle place pour la chasse? Quel avenir pour cette chênaie après 475 ans de présence, le processus naturel conduisant à la régression du chêne voire sa disparition face à la concurrence du hêtre et de l’érable sycomore?...

Le résultat sera un compromis équilibré compte-tenu des caractéristiques du site :

  • privilégier l’enjeu de conservation des espèces liées aux vieux bois et la libre expression des dynamiques naturelles, ce qui constituera un observatoire de premier plan ;
  • accueillir et sensibiliser le visiteur sur des itinéraires balisés et sécurisés ;
  • poursuivre la régulation de la grande faune pour éviter les zones de concentration néfastes pour le reste de la forêt.

À la suite de la visite du rapporteur à l’été 2022, la commission « Aires Protégées » du Conseil national de protection de la nature réunie le 28 septembre 2022 a émis un avis favorable au dossier de création de la réserve. La consultation des maires des communes concernées et des services de l’Etat est en cours pour permettre la prise de l’arrêté ministériel prononçant officiellement la création de la réserve.

Pourquoi une réserve « dirigée » ?

Le statut de réserve biologique dirigée a été retenu pour

  • permettre le contrôle de certaines espèces envahissantes (comme l’ailante ou le cerisier tardif) ;
  • réaliser quelques travaux légers en faveur de la régénération de chêne (y compris le ramassage de glands sur ce peuplement d’élite) ;
  • mettre en œuvre des actions favorables aux milieux ouverts et aux mares. 

Cependant, la volonté est clairement de laisser les peuplements forestiers évoluer librement en dehors des trouées naturelles et des mares.

Des partenaires indispensables

Les études pour inventorier et suivre cette biodiversité, étapes essentielles pour la création du dossier de réserve et la rédaction du plan de gestion, ont été réalisées avec le Conservatoire botanique national de Bailleul, le Conservatoire d’espaces naturels des Hauts-de-France, Picardie Nature, l’Association des entomologistes de Picardie et l’expertise naturaliste de l’ONF. Elles ont été co-financées par l’Etat, le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires via la mission d’intérêt général biodiversité, par le Département de l’Oise et par l’ONF.

Une nécessaire valorisation du site : le sentier du Pic mar

L’enjeu de sensibilisation et de valorisation pédagogique constitue une dimension importante du projet pour promouvoir et faire connaître les enjeux et les richesses de ce patrimoine unique.

Le sentier pédagogique du Pic mar est parcouru de 12 panneaux sur 1,5 km en bordure de réserve pour expliquer aux visiteurs l’importance du site, la libre évolution des peuplements au sein des parcelles avec toute la biodiversité associée, et donc la fermeture des accès non sécurisés.


La scénographie a été réalisée en complémentarité avec le sentier de la Rainette sur la thématique de l’eau au Vivier Corax en retenant ici le thème de l’emblématique oiseau et des peuplements forestiers sénescents.

Les financeurs du projet

Le sentier du Pic mar a été soutenu financièrement par le Département de l’Oise. La réserve des Beaux Monts et des mares Saint-Louis est également incluse dans le réseau européen d’espaces protégés Natura 2000, dont le comité de pilotage est présidé par l’Agglomération de la région de Compiègne. Cela a permis la signature de contrats au titre de la mesure visant à informer les usagers de la forêt pour installer 30 balises réglementaires "délimitation de réserve" et 12 panneaux "porte de réserve" co-financés par l’Europe et le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires.

©Félix Vigné / ONF