Dans ce journal de bord, Nathan Devin vous présente son travail. Il est adjoint au responsable du service Forêt pour l'agence de Haute-Savoie à l'Office national des forêts (ONF).
La sylviculture, c'est l’art et la science de "cultiver" les forêts. La mission du service forêt consiste à questionner et stimuler les techniques sylvicoles, afin de faire évoluer ou d’améliorer les pratiques. L’objectif est d’accompagner les forestiers vers une sylviculture toujours plus durable et performante.
Nous travaillons régulièrement avec les équipes du pôle Recherche, Développement & Innovation (RDI) de l’ONF, localisées à Chambéry, pour développer de nouveaux procédés. Quand les protocoles expérimentaux montrent de bons résultats, ils peuvent être déployés plus largement sur le terrain.
Je partage mon quotidien entre aménagements et animations sylvicoles. Je diffuse les bonnes et nouvelles pratiques sylvicoles.
Nathan Devin,
adjoint au responsable du service Forêt de l'agence Haute-Savoie à l'ONF.
À titre d’exemple, nous avons expérimenté récemment une pratique qui consiste à gratter le sol avec une pelle pour enlever les couches de myrtilles qui tapissent souvent les sols des forêts en montagne, empêchant ainsi le sol de se régénérer. Ce procédé, qui permet à la graine de l’épicéa d’atteindre le sol, a prouvé son efficacité et se développe maintenant sur tout l’arc Alpin. Mais parfois, cela ne fonctionne pas. Ce fut le cas, par exemple, pour un dispositif de protection que nous avions installé pour préserver les jeunes pousses des gibiers : le système installé protégeait effectivement les plants des ongulés, mais faisait moisir les bourgeons. Nous n’avons pas donné suite à ce dispositif.
Je partage mon quotidien entre aménagements et animations sylvicoles. Je diffuse des bonnes et des nouvelles pratiques sylvicoles. En 2020, durant les premières semaines de télétravail, je me suis concentré sur le retard accumulé sur certains dossiers (rédaction, relecture…). J’ai également dû me rendre sur le terrain pour une commande urgente qui nécessitait un devis. Finalement, je suis sorti du confinement avec quatre dossiers prêts à être présentés aux élus pour des projets en forêts communales. Le reste de mon temps, je l’ai consacré à l’organisation d’un projet multi partenarial : l’Observatoire des forêts en Haute-Savoie.
Le service Forêt en action : des relevés de terrain
Démarré à l’automne 2019 avec la réunion des partenaires, le projet de l'Observatoire de Haute-Savoie a connu une étape clé le 28 mai 2020 : le lancement de la première campagne de relevés, avec la formation des opérateurs chargés de recueillir les données en forêt publique et privée. Ici en images, découvrez la formation des opérateurs avec Yoann Paillet, de l'INRAE.
En mai 2020, des relevés ont eu lieu dans le respect des consignes sanitaires liées à la crise du Coronavirus, avec l’expertise de Réserves naturelles de France, de l’INRAE (ex-IRSTEA) et d’un spécialiste des dendromicro-habitats basé à Grenoble. L’objectif : mieux saisir le fonctionnement écologique de la forêt, pour relever les habitats propices à la faune et à la flore forestière. Ici par exemple, une mesure du bois mort au sol par transect.
En Haute-Savoie, 40% du territoire est recouvert par la forêt. Cela représente 188 400 hectares forestiers gérés par de multiples acteurs (privés, publics, propriétaires, gestionnaires…) qui ont besoin de partager une vision exhaustive et homogène de la forêt et de son évolution, afin de dynamiser et de coordonner leurs actions en faveur d’une forêt durable.
Ce projet multi partenarial, piloté par l’ONF, permettra de recueillir des données terrain sur l’évolution des différentes essences de végétaux, sur la quantité et la qualité de la ressource en bois et sur la richesse de la biodiversité. L'objectif : établir des modèles statistiques caractéristiques des forêts de Haute-Savoie. Les données issues de l’observatoire permettront ainsi de mieux connaître la ressource forestière du territoire et d’en orienter sa gestion, pour préserver et valoriser ces espaces naturels.
Ce projet s’appuie sur une technologie de télédétection, le LiDAR, et sur le travail de forestiers qui relèvent des données sur le terrain via des placettes permanentes. Le département RDI de l’ONF croise ensuite les données LiDAR avec celles du terrain pour créer des modèles et aboutir à une cartographie précise des variables dendrométriques (composition en essences, diamètre, hauteur, surface terrière*) et des conditions de mobilisation de la ressource.
Grâce aux placettes permanentes, dans 10 à 20 ans, nous pourrons suivre ces arbres et obtenir des données de flux : accroissement des forêts, dépérissement, régénération, vieillissement ou rajeunissement des peuplements… Cette opération va permettre de renforcer les liens entre les différents professionnels de la forêt, et de positionner l’ONF comme un acteur capable de développer les nouvelles technologies au service de la gestion durable des forêts.
Télédétection par LiDAR
La Haute-Savoie est l’un des départements les plus forestiers de France. Dans le cadre de sa politique environnementale, le Département ambitionne de préserver les milieux forestiers rares ou favorables à la biodiversité. Grâce aux données de l’observatoire, nous allons effectuer un état des lieux, sur les placettes permanentes, des micro-habitats (décollements d’écorce, cavités…) qui sont des sources de biodiversité en forêt.
Ces données, combinées avec celles d’autres partenaires (Conservatoire des espaces naturels de Haute-Savoie, Ligue pour la protection des oiseaux, Conservatoire botanique national…), devraient nous permettre de caractériser les habitats les plus propices au développement des espèces (en termes d’essences, de volume de bois mort...). Nous pourrons également identifier des "zones de vigilance", afin de prendre encore plus de précautions dans la programmation des dessertes, des travaux ou des exploitations.
