Île-de-France : sur les traces du chat forestier

Depuis décembre 2022, une campagne de recherche du chat forestier a été lancée en Ile-de-France par l’Office français de la biodiversité (OFB), l’Office national des forêts (ONF), l’agence régionale de la biodiversité, le Conseil Départemental de Seine-et-Marne et celui de l’Essonne, Ile de France Nature (IDFN), le CPIE des Boucles de La Marne, et l’association de Gestion de la Réserve Naturelle de la Bassée (AGRENABA). Cette étude entend confirmer sa présence en Seine-et-Marne et valider son aire de répartition la plus à l’Ouest (Essonne) grâce à des pièges photographiques installés principalement en lisière de forêt.

Excellente nouvelle ! Le véritable chat sauvage ou chat forestier (forme Felis sylvestris sylvestris) est présent en Seine-et-Marne et en Essonne. C’est en tout cas ce que révèle les premiers résultats de l’étude initiée par l’OFB.

Travail auquel l’ONF participe depuis 2 ans puisque de nombreux secteurs concernés se situent dans les forêts domaniales :

  • Jouy, Villefermoy, Commanderie, Fontainebleau et Trois-Pignons étudiées en 2023
  • Barbeau, Champagne, Fontainebleau, Nanteau, Malvoisine et Trois-Pignons étudiées en 2024

Le chat forestier : dernier félin sauvage de la région

Cet animal sauvage mesure une soixantaine de centimètres de long, au pelage rayé gris ou fauve, à la queue épaisse. C’est l’unique représentant des félins à vivre dans la nature en Île-de-France. Son petit gabarit et la couleur de son pelage font qu’il se confond facilement avec le chat domestique. Il est reconnaissable grâce à la présence d’une bande dorsale noire unique et fine s’arrêtant à la base de la queue. Mais à l’œil, son identification reste difficile, d’où la nécessité de disposer de preuves génétiques pour bien l’identifier.

C’est un carnivore qui se déplace beaucoup : « il dépend du milieu forestier pour la reproduction et la majorité de son cycle de vie. Toutefois, il affectionne les prairies, les clairières et les zones agricoles situées en lisière. Là où, il chasse des petits mammifères comme le campagnol ou le renard » note Alexandre Butin, responsable adjoint de l'unité territoriale de Fontainebleau. C’est là que les points d’observation ont d’ailleurs été installés en forêt.

Bien présent dans le Nord-Est de la France

« Le chat forestier est une espèce de chat sauvage qui fait partie de la faune sauvage. Beaucoup chassé entre le XVIIIe et le XXe siècle pour sa fourrure, cette espèce, aujourd’hui protégée, regagne du terrain ».

En France, les populations subsistent dans le grand quart Nord-Est, dans le Massif central. Depuis une quinzaine d'années, l’aire de répartition nationale s’étend à nouveau vers le Sud et l’Ouest depuis la zone de présence du Nord-Est de la France. Il existe également une population Pyrénéenne.

 « C’est un phénomène normal, lorsque les populations augmentent, les jeunes se déplacent davantage à la recherche de nouveaux territoires plus lointains à occuper ».

Pour le moment, l’Île-de-France se situe en limite d’aire de répartition, avec déjà quelques observations confirmées génétiquement en Seine-et Marne et Essonne. Là où pourtant, il disparaît au siècle précédent. Des traces ont été observées dès les années 90, puis un inventaire en 2010 est venu confirmer sa présence dans le massif de Fontainebleau.

Chat forestier (Felis silvestris silvestris) - ©Philippe Massit_Office français de la biodiversité

Mieux connaître l’espèce pour mieux la protéger

Si depuis les années 70, l’espèce n’est plus chassée, plusieurs menaces pèsent sur elle : fragmentation de son habitat, diminution des prairies, braconnage, collisions avec les voitures ou encore hybridation avec le chat domestique. Risques qui augmentent d’autant plus en Île-de-France avec la forte urbanisation des espaces et la présence de nombreux chats domestiques.

Les connaissances actuelles sur le chat forestier ne suffisent pas à assurer sa préservation. « Sa présence sur le territoire francilien est mal connue. L’espèce étant en expansion lente, il est nécessaire d’améliorer nos connaissances ». Raison pour laquelle, l’OFB et l’ONF, associés à d’autres partenaires, ont souhaité l’étudier.

Durant 2 ans (2023 et 2024), l’étude conduite entre janvier et mars, a permis de collecter des indices de présence in situ. En Seine-et-Marne et Essonne, huit forestiers de l’ONF ont été mobilisés pour suivre, collecter ces données avec la pose de 20 à 30 dispositifs suivant les années. La coordination et la synthèse de cette étude ont été assurées par le réseau mammifère de l’ONF.

Dispositif pour collecter des indices génétiques sur les chats - ©Ophélie Ricci / ARB Ile-de-France

Des « pièges à poils »

Comme il n’est pas facile d’observer ce petit félin nocturne et solitaire, il a fallu utiliser une technique particulière. Dans les zones préalablement choisies en forêt, des « pièges à poils », constitués de brosses en laiton, de racine de valériane, ont été installés sur des arbres à 30-40 cm du sol. Des appareils photographiques pointent sur cette installation afin de prendre des clichés de tout chat qui viendrait se frotter sur la brosse.

« En couplant, les analyses génétiques des poils récupérés sur les brosses avec l’examen morphologique, fait avec les images, nous pouvons confirmer s’il s’agit bien de chats forestiers, domestiques ou hybrides ». 

Indices envoyés en laboratoire pour les analyses génétiques

La campagne de 2023 confirme bien la présence de l’animal dans les forêts domaniale de Jouy, de Villefermoy et de la Commanderie. En 2024, de nouvelles forêts sont venues compléter l’étude. Il faudra attendre encore quelques mois pour connaître les résultats définitifs mais d’ores et déjà des chats phénotypés forestiers ont été observés en forêts domaniales de Fontainebleau, Barbeau, Champagne, Nanteau et dans l’Essonne.

 Les résultats seront centralisés dans la base de données naturalistes du Système d’information de l’inventaire du patrimoine naturel (SINP).

©Guillaume Larrière / Miléna Vasconcelos - ONF