©Eric Facon / 16 Prod / ONF

L'adaptation des forêts au changement climatique au cœur de la coopération internationale

Chaque année, plusieurs délégations étrangères sont accueillies par l’ONF à la demande, le plus souvent, du ministère en charge des forêts, ou de partenaires de l’État. Olivier Van den bossche, chargé de mission à la Direction des relations institutionnelles, de l’outre-mer et de la Corse (DRIOM), revient sur l’intérêt de ces échanges.
Entretien avec Olivier Van den bossche : "Nous avons beaucoup à apprendre de nos échanges avec les autres pays"

L’ONF a accueilli en 2024 plusieurs délégations internationales. Dans quel contexte ces visites voient-elles le jour ?

Lettonie, Géorgie, République Tchèque, Allemagne, Finlande, Hongrie… En 2024, plusieurs délégations étrangères ont sollicité un temps d’échanges approfondi avec l’Office national des forêts. Depuis plusieurs années, au sein de l'ONF, la Direction des relations institutionnelles, de l’outre-mer et de la Corse (DRIOM) pilote ces missions institutionnelles fondées sur le partage d’expériences et de cas pratiques avec, lorsque c’est possible, des visites de terrain organisées grâce au concours des directions territoriales. Comme ce fut le cas notamment en forêts domaniales de Sénart, de Fontainebleau ou de Compiègne. C’est important que nos homologues rencontrent les équipes, visualisent les peuplements forestiers et appréhendent concrètement les problématiques que nous rencontrons. Ces échanges interviennent soit à la demande de l'Etat, dans le cadre de coopérations et de partenariats européens, soit en lien avec les organismes forestiers d’autres pays.

Au sein de l’Union européenne, l’ONF fait-il partie d’un réseau spécifique dédié à la gestion des forêts ?

L’Office est membre fondateur de l’association EUSTAFOR qui représente, depuis sa création en 2005, les gestionnaires de forêts publiques à Bruxelles et réunit 40 membres issus de 28 pays européens. C’est dans ce cadre, par exemple, que nous avons récemment été sollicités par Lesy Ceské Republiky, l’équivalent de l’ONF en République Tchèque, sur les questions de la commercialisation et de la contractualisation des bois.

Cet été 2024, la France a également rejoint le groupe « For Forest + » rassemblant plusieurs États-membres de l’Union européenne (Suède, Finlande, Slovénie, Autriche) dans le cadre d’un partenariat informel autour de la gestion durable des forêts. Ces pays échangent des connaissances et des bonnes pratiques, avec l’objectif d’identifier des positions communes sur les politiques européennes. Enfin, nous travaillons avec ONF International qui maintient et développe ses propres réseaux bilatéraux (projets en Turquie, Maroc…).

Quelles sont les thématiques principales abordées lors de vos échanges ?

Sans surprise, l’adaptation des forêts au changement climatique est un sujet de préoccupation majeur. Au sein de l’ONF, ces échanges mobilisent les experts de la direction Forêts et risques naturels, notamment Erwin Ulrich, pilote de la mission Adaptation des forêts au changement climatique à l’ONF, et Brigitte Musch, responsable du Conservatoire génétique des arbres forestiers sur la problématique graines et plants et migration assistée.

En juillet 2024 notamment, après avoir accueilli une délégation ministérielle géorgienne, l’ONF a réalisé une mission de prospection en Géorgie, hotspot de biodiversité disposant d’un fort taux d’endémisme et de types d’écosystèmes forestiers intéressants pour nos ressources génétiques forestières. Face à la situation sanitaire des forêts, il est essentiel de pouvoir dialoguer à une échelle plus large pour trouver les réponses adaptées à nos problématiques.

Photos de sapins souffrant de la sécheresse et sensibles aux attaques des scolytes.
Fragilisés par la sécheresse, les sapins sont très sensibles aux attaques des scolytes. - ©Elodie De Vreyer / ONF
Photo des équipes Défense des forêts contre les incendies (DFCI) de l'ONF
Les équipes Défense des forêts contre les incendies (DFCI) de l'ONF - ©Nathalie Petrel / ONF

Parmi les autres thématiques importantes abordées, à la demande des délégations internationales, on trouve souvent la défense des forêts contre les incendies, la restauration des terrains en montagne et l’intégration de la biodiversité dans les aménagements forestiers. Nous avons tout à gagner de ces rencontres pour améliorer nos stratégies, comparer nos modèles voire même, se mettre en conformité par rapport aux règlements et directives de l’Union européenne.

Regards croisés franco-hongrois

La Hongrie a connu en 2023 un feu de forêt d’une ampleur exceptionnelle (à son échelle), avec dix hectares partis en fumée. Une première pour ce petit pays représentant environ un sixième du territoire français. Cet événement marquant a conduit MECSEKERDÖ, gestionnaire régional des forêts hongroises, à améliorer sa stratégie de défense des forêts contre les incendies. C’est dans ce cadre que les 12 et 13 novembre 2024, l’ingénieur forestier Miklós Szénási est venu chercher conseil auprès des équipes de l’ONF, accompagné du conseiller scientifique de l’Ambassade de Hongrie en France.

Après des échanges avec Guillaume Péghaire, chef du département Risques Naturels et Rémi Savazzi, expert technique national incendie de forêt de l’agence DFCI Midi-Méditerranée, une visite de terrain a été organisée en forêt de Fontainebleau pour une découverte pratique de l’organisation mise en place par la direction territoriale Seine Nord en matière de défense des forêts contre les incendies.

Des échanges fructueux qui s’inscrivent dans un partenariat plus ancien entre l’ONF et MECSEKERDÖ. "Les contacts entre l’ONF et son homologue hongrois existent de longue date et ont porté leurs fruits. L’idée, pour eux comme pour nous, est de s’aider mutuellement et de progresser collectivement au service de la protection et de la gestion des forêts" explique Erwin Ulrich, pilote de la mission adaptation des forêts au changement climatique, Direction forêts et risques naturels.

En 2020, ce même Miklós Szénási était allé à la rencontre des collègues de la Sècherie de la Joux en vue de créer un dispositif similaire en Hongrie. C’est désormais chose faite puisque la première sécherie hongroise vient de voir le jour en 2024 !

À la suite des grands feux de 2023, MECSEKERDÖ a décidé de mettre en œuvre une stratégie de surveillance et de défense des forêts contre les incendies, plus efficace. Comme j’avais déjà eu des échanges fructueux avec l’ONF, j’ai recontacté l’Office pour en apprendre davantage cette fois sur le système français de DFCI. Nous souhaitions avoir un retour d’expérience sur les process opérationnels et les méthodes de prédiction développés.

Miklos Szénási, ingénieur pour l’agence régionale de MECSEKERDÖ