La recherche à l'ONF

Une connaissance toujours plus fine des forêts est la première étape avant de trouver des solutions d’adaptation au réchauffement climatique. L’ONF et ses partenaires scientifiques développent de nombreux projets de recherche à cet effet.

De nombreux outils d’observation et de suivi

Forestiers et chercheurs, main dans la main. Pour adapter les forêts au changement climatique, les outils de connaissance, d’observation et de suivi sont indispensables. Le service Recherche, développement, innovation (RDI) de l’ONF compte 75 personnes réparties dans toute la France et travaille en partenariat avec de nombreux organismes. « En 2023, nous avons déployé au niveau national plusieurs outils de recherche pour répondre aux besoins des gestionnaires de forêts publiques et privées », indique Xavier Bartet, adjoint à la cheffe du département Recherche développement et innovation (RDI) de l'ONF.

Évaluer l'état sanitaire avec DEPERIS

Développé par le Département Santé des forêts du ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, DEPERIS permet aux forestiers de qualifier de façon objective et commune l’état sanitaire des arbres sur des zones témoins (placettes). Sur la base de deux critères, la mortalité des branches et la perte de ramification, l’arbre est noté de A (parfaitement sain) à F (complètement dégradé).

L'utilisation de cet outil a confirmé en 2023 les inquiétudes des forestiers quant à la fragilisation des chênes exceptionnels de la forêt de Tronçais. En seulement trois ans, 60 % des placettes identifiées comme saines en 2020 sont passées en état dépérissant.

Photos de chênes sessile avec leurs notations Deperis (de sain à très dégradé)
De G à D : Chêne sessile noté B (sain) / Chêne sessile noté D (dégradé) / Chêne sessile noté F (très dégradé) - ©DSF / agriculture.gouv.fr

Détecter plus tôt le dépérissement avec FORDEAD

Méthode développée par l'Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE), en collaboration avec l’ONF et d’autres partenaires, FORDEAD permet de détecter des anomalies de végétation à partir de données satellitaires. Elle a été imaginée en 2021 pour repérer précocement les dépérissements d’épicéas ravagés par le scolyte, insecte qui prolifère avec le réchauffement des températures. Quelque 90 000 hectares ont été décimés ces dix dernières années. « L’intérêt est d’identifier plus vite les arbres malades, avant qu’ils ne soient complètement secs. Ce qui permet aux forestiers de les couper plus tôt, d’éviter la contamination des autres peuplements et de mieux vendre les bois touchés », explique Xavier Bartet.

En 2023, la méthode a été étendue aux sapins et aux peuplements mélangés. Développées au départ dans le Nord-Est, les cartographies ont commencé à être produites pour les forêts de plus haute altitude désormais touchées (Alpes, Pyrénées, Massif central).

Parcelle de forêt vue d'en haut avec et sans légende Foredead
De G à D : photo IGN / Photo IGN avec légende Foredead - ©ONF

Des cartographies haute définition grâce au LiDAR

À la faveur de son partenariat avec l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN), l’ONF a bénéficié de la mise à disposition de données LiDAR (Light detection and ranging). Cette technique de mesure de distance (télémétrie) exploitant les propriétés de la lumière produit des nuages de points qui permettent de réaliser des modélisations 3D. Couplé à des mesures de terrain, le LiDAR fournit une description précise du massif forestier.

250 000 km2 de couverture forestière LiDAR ont déjà été fournis à l’ONF par l’IGN. Sur cette base, les chercheurs de l’ONF se sont fortement mobilisés pour produire des modèles numériques 3D représentatifs du sol et de la surface des forêts concernées. « Nous travaillons à l’élaboration d'une chaîne de traitement de données permettant de passer de données brutes à des caractéristiques concernant les arbres et les forêts : diamètre, hauteur, volume, densité, etc. », précise Xavier Bartet. Des premières cartographies haute définition ont été réalisées fin 2023 en Provence-Alpes-Côte d’Azur, Occitanie, Grand Est, Île-de-France, Hauts-de-France et Normandie. L’objectif est désormais d’amplifier la production sur l’ensemble du territoire.

Cartographie LiDAR
Cartographie LiDAR

Face aux enjeux actuels, l'apport de la recherche est fondamental pour accompagner les forestiers.

Xavier Bartet, adjoint à la cheffe du département RDI de l'ONF

Ces travaux de modélisation s’appuient sur deux outils internes récemment déployés : une infrastructure nationale de stockage et de traitement des données cartographiques, plus performante et évolutive, et VISULID, une application de valorisation et de mise à disposition des données LiDAR modélisées permettant d’optimiser l’élaboration et le suivi des aménagements forestiers.

RENECOFOR, l’observatoire des écosystèmes forestiers

Photo d'un forestier réalisant un prélèvement pédologique sur une placette RENECOFOR
Prélèvement pédologique sur une placette RENECOFOR - ©Giada Connestari / ONF

Le réseau national de suivi à long terme des écosystèmes forestiers (RENECOFOR) a été créé par l'ONF en 1992 à la suite de la crise européenne des pluies acides. Son objectif : détecter les modifications des systèmes forestiers et en comprendre les raisons. Pour cela, 102 sites (appelés « placettes ») sont régulièrement observés et mesurés : arbres, sol, diversité végétale, atmosphère.

Pour un suivi plus précis, deux équipes de l’ONF et de l’université de Louvain (Belgique) ont entamé la géolocalisation des arbres de chaque placette. Ces données enrichies augmentent les usages possibles du réseau. Elles permettent par exemple d’étudier si un arbre profite ou au contraire pâtit du voisinage d’un autre arbre. 61 placettes ont ainsi été cartographiées en 2023, s’ajoutant aux 32 qui l’ont été en 2021 et 2022. Les 9 dernières le seront d’ici juin 2024.

Des outils d’anticipation pour guider les choix des forestiers sur le terrain

Quelles essences planter pour que la forêt résiste au changement climatique ? Pour répondre à cette question complexe, l’ONF s’appuie sur différents outils développés par son département Recherche, développement et innovation (RDI) avec différents partenaires scientifiques. Ces aides à la prise de décision guident l’action des équipes de terrain, qui s’en servent pour adopter la meilleure stratégie dans un contexte où la hausse des températures pourrait dépasser les + 4 °C en France d’ici à 2100.

La plateforme ClimEssences

Créée par le réseau français d’adaptation des forêts au changement climatique (AFORCE), la plateforme ClimEssences propose aux gestionnaires forestiers des informations sur le comportement des essences d’arbres en croisant leurs points de présence actuelle avec les indicateurs du climat futur.

Objectif ? Déterminer, à l’échelle régionale (ou à celle de grands massifs forestiers), leur compatibilité climatique avec leur position géographique, en suivant les différents scénarios du GIEC, de « pessimiste » à « optimiste ».

Forestier utilisant la plateforme Clim Essences
Forestier utilisant la plateforme Clim Essences - ©Justine Hubert/ONF

Avec Météo-France, qui a produit des études de trajectoire climatique, une nouvelle convention devrait permettre la mise à disposition de données. Elles aideront l’ONF à faire évoluer l’outil sylvoclimatique ClimEssences.

L'outil Zoom 50

Elaboré par les forestiers du Grand Est avec le département RDI et AgroParisTech, Zoom 50 est un outil qui conçoit des cartes climatiques. Il permet d’identifier à une échelle très locale les peuplements vulnérables, de choisir les essences à favoriser et de prioriser les besoins en renouvellement des peuplements dégradés.

L'outil RenouvEau

Développé en Bourgogne-Franche-Comté sur la base de travaux menés avec le Centre régional de la propriété forestière, l'outil RenouvEau s’appuie notamment sur les données de diagnostic du sol et de la dynamique naturelle de la forêt pour suggérer les essences les plus adaptées.

ClimEssences, Zoom 50 et RenouvEau proposent un triple éclairage pour favoriser la résilience des forêts.

Xavier Bartet, adjoint à la cheffe du département RDI

Photo d'un sondage pédologique dans le cadre d’un diagnostic RenouvEau en forêt communale de Tavaux (Jura)
Sondage pédologique dans le cadre d’un diagnostic RenouvEau en forêt communale de Tavaux (Jura) - ©Astrid Lemoine / ONF