La stratégie carbone de l'ONF
Préserver les stocks de carbone en forêt
Pour les forestiers, la gestion forestière, c’est beaucoup d’observation, d’anticipation, des interventions minutieuses et l’application de techniques sylvicoles mesurées. La gestion forestière, dans ce très fort contexte de décarbonation à l’échelle nationale, c’est donc l’équilibre entre la préservation d’un stock de carbone séquestré en forêt et le maintien d’une production vers des produits durables.
Pour assurer cette gestion cruciale, il faut donc poursuivre ce qui a déjà été entamé en misant notamment sur la quantification des stocks de carbone en forêt et la prise de conscience de leur vulnérabilité. "Il y a tout un travail méthodologique réalisé en ce moment pour ajouter la "métrique" carbone dans nos aménagements", témoigne Christine Deleuze, directrice de projet "stratégie carbone".
L’ONF occupe une place importante car ce sont les forestiers qui, par leurs connaissances de terrain, pourront ensuite conseiller des communes qui ont aujourd’hui établi leur bilan carbone. "Les propriétaires, en particulier les communes, doivent prendre davantage conscience de la valeur carbone des forêts", indique Christine Deleuze. Le conseil du gestionnaire ONF guidera avec pertinence les aménagements en forêts entre la protection du carbone sur pied et l’adaptation des peuplements pour le maintien de leur production. La question du carbone est au cœur de la gestion de l'ONF, au même titre que la biodiversité et le bois.
Les propriétaires, en particulier les communes, doivent prendre davantage conscience de la valeur carbone des forêts.
Renouveler les forêts avec des essences adaptées
La situation est connue : les forêts souffrent de nombreux dépérissements expliqués, pour beaucoup d’entre eux, par l’accélération du changement climatique et les attaques de parasites. Pour aider la forêt à se renouveler et introduire des essences et des provenances plus adaptées, des projets de plantations sont aujourd’hui indispensables.
Pour contribuer au renouvellement forestier, l’Office propose aujourd’hui aux entreprises volontaires de contribuer au financement de ces plantations à travers l’achat de tonnes de CO2 (voir notre encadré sur le label bas-carbone). Une opération qui se veut gagnante-gagnante puisque d’un côté, les entreprises assurent dans leur démarche ERC (évaluer-réduire-compenser) une compensation carbone de leur empreinte résiduelle, de l’autre l’ONF peut entreprendre le renouvellement forestier précieux et utile à la bonne santé des forêts françaises.
Les méthodes de premier boisement, de reboisement de forêts dégradées et de conversion de taillis en futaies sont les trois seules méthodes forestières aujourd’hui validées par le ministère de la Transition Ecologique. Elles sont opérationnelles et donnent tous les critères d'éligibilité au Label bas-carbone (calcul du carbone, intégration des co-bénéfices apportés par la forêt…)
Le Label bas-carbone
Les entreprises qui souhaitent faire de la compensation font appel à l’ONF qui se charge ensuite de leur proposer des projets labellisés bas-carbone.
Sur place, ce sont les équipes de l’ONF qui assurent le suivi de la bonne croissance des jeunes plants de la parcelle jusqu’à la cinquième année. Pour la suite, le petit plus proposé par le Label bas-carbone, c’est l’existence d’un fonds de garantie des tonnes de CO2 labellisés prévu en cas d'incident survenu sur la parcelle labellisée entre la 5ème et la 30ème année.
Pourquoi 30 ans ?
Le Label bas-carbone permet un calcul de séquestration carbone sur 30 ans permettant d’être en phase avec l’objectif de neutralité carbone de l’Etat d’ici à 2050. Autrement dit, les arbres plantés mettront 30 ans pour capturer le volume de carbone à compenser par une entreprise, sur une année.
Notons ici qu’après les cinq années suivant la plantation, l’ONF se charge également de vérifier la densité sur la parcelle replantée. En effet, il faut un minimum de plants à l’hectare pour que la plantation soit réussie et conforme à la trajectoire de séquestration carbone prévue.
À noter
Le ministère en charge de la Transition Ecologique a mis en place, en 2018, le cadrage réglementaire du Label bas-carbone afin d’assurer une totale transparence des projets labellisés, une démarche rigoureuse d’évaluation du carbone séquestré et une prise en compte d’un ensemble de co-bénéfices environnementaux (diversité des essences, protection des sols, biodiversité) pour une plus grande intégrité environnementale. Ce label est régulièrement mis à jour afin d’en améliorer l’exigence et de prendre en compte les évolutions nécessaires.
Le projet Vosgelis
Parmi les 69 projets labellisés par l’ONF, l’entreprise vosgienne de logements publics, Vosgelis, soucieuse d’avoir un impact positif sur son territoire, a choisi de financer un projet de plantation de 2 hectares en forêt domaniale de Humont, à hauteur de 344 tonnes de carbone à capturer.
À cheval sur les communes de Bellefontaine et de Saint-Nabord, cette plantation concernera quelques 2 800 arbres de sept essences différentes parmi lesquelles le chêne pubescent, le châtaignier, le cormier ou encore le pin laricio de Corse. L’opération a commencé à l’automne 2022 et s'est terminée au printemps 2023.
Au-delà de cette démarche volontaire de compenser ses émissions de carbone, l'entreprise Vosgelis s’est engagée auprès de l’ONF en affichant un désir solide de participer à la préservation locale de la forêt domaniale de Humont, victime de nombreux dégâts causés par les scolytes.
Orienter la gestion vers la production de bois d’œuvre
Les accords internationaux sur le climat, la politique européenne climat-énergie ainsi que la Stratégie nationale bas-carbone reconnaissent qu’une forêt gérée durablement agit efficacement en tant que dispositif prélevant du carbone dans l’atmosphère. Le bois est un matériau en capacité de prolonger le stockage de carbone dans les arbres sur pied, en assurant une séquestration du carbone à moyen–long terme dans les produits à longue durée de vie. C'est également un biomatériau de substitution à d’autres alternatives "carbonées", en particulier dans les domaines de la construction, de l’emballage, de l’ameublement ou de l'énergie.
L’objectif de l'ONF est de sécuriser la séquestration et le stockage de carbone dans les peuplements afin de contribuer activement à la Stratégie nationale bas-carbone et à la transition vers une bioéconomie plus verte et décarbonée. Cette contribution passe conjointement par la reconstitution et le renouvellement des forêts, la poursuite du choix déterminé en faveur des sylvicultures de bois d’œuvre, la mobilisation de bois issus de la gestion durable et leur valorisation par un tissu d’entreprises locales, respectant la hiérarchie des usages des bois.
En allant vers le bois d’œuvre, on oriente le bois que l’on produit vers des durées de vie plus longues et donc des plus fortes valeurs ajoutées carbone.
Le rôle de la forêt face au changement climatique
La forêt participe à l’atténuation du réchauffement climatique. Elle rend trois grands services à la planète :
- La forêt joue un rôle de réservoir grâce au stockage du carbone qu’elle opère dans la végétation ainsi que dans les sols. L’enjeu de la préservation des sols est donc doublement majeur car de leur exploitation dépend directement la bonne santé des peuplements d’une part, et la conservation ou la libération de ce carbone d’autre part. Chaque année, les sols forestiers séquestrent environ 20 millions de tonnes de CO2.
- La forêt est le premier puits de carbone terrestre. L’augmentation avérée de la surface forestière globale au siècle dernier assure donc aujourd'hui une augmentation encore du stockage de carbone ainsi retiré de l’atmosphère.
- La forêt produit le matériau renouvelable par excellence : le bois. Dans une société qui vise la neutralité carbone, le bois occupera une place prépondérante. L’un des objectifs de l’ONF est de permettre que le bois se substitue progressivement, et le plus souvent possible, aux matériaux et aux énergies fossiles.
S'inscrire dans une démarche RSE
Séquestration du carbone, protection de la biodiversité, priorité à la régénération naturelle de nos forêts… Tout converge à l’ONF vers un respect du vivant et des écosystèmes. La stratégie RSE de l’ONF, validée en 2022, comporte une dizaine d'actions dédiées à l’empreinte carbone de l'établissement. Elles visent à aller "au plus utile et au plus concret", précise Olivier Van Den Bossche, chargé de mission "relations internationales et coordination du réseau DOM", en charge de la stratégie RSE.
La décarbonation des actions menées en forêt est un enjeu fort pour l’établissement. Aujourd’hui, l’ONF calcule le bilan carbone de l’établissement, qu’il s’agisse de la consommation de carburant des véhicules professionnels et des engins utilisés lors du travail des entreprises de travaux forestiers ou de travaux sylvicoles, du poids du numérique... Pour améliorer son bilan carbone, l’ONF cherche une sobriété numérique croissante, notamment par la mise en place de serveurs de nouvelle génération, plus respectueux des enjeux environnementaux. Une réflexion est aussi engagée sur l'empreinte carbone des chantiers d'exploitation.
La stratégie bas-carbone de l’ONF, c’est aussi, pour les équipes, prendre l’habitude de privilégier les écogestes. Depuis 2021, deux campagnes de sensibilisation ont été menées, pointant par exemple l’importance du tri (mails, déchets) et de privilégier le zéro déchet.
Mais le carbone se trouve aussi dans les achats. De nouveaux réflexes d’achats, moins consommateurs d’énergie, font aussi partie des axes à renforcer.
Un effort conséquent, déjà engagé par l’ONF, concerne l'empreinte carbone liée à l'immobilier. Depuis 2020, la mise en œuvre des plans de relance (volet rénovation énergétique des bâtiments) et de résilience (réduction de la dépendance aux énergies fossiles importées), complétés par des financements en fonds propres, ont permis de financer 206 projets pour un total de 10,4 M€. Ces opérations permettent des réductions des émissions de gaz à effet de serre et des économies d’énergie sur le court terme, avec un gain moyen d’environ 30 % sur les consommations des sites.
Le siège de l'ONF, une construction bas-carbone
Installé à Maisons-Alfort, le siège de l'ONF a été entièrement réalisé à partir de bois français issu des forêts domaniales (dont 84% des forêts domaniales des régions Centre-Val de Loire, de la Nouvelle Aquitaine et du Grand Est). La structure du bâtiment est composée de bois d’épicéas, de pins sylvestres et de douglas. Des panneaux photovoltaïques, installés sur la toiture, permettent de répondre à une partie des besoins énergétiques du siège. Un système de récupération des eaux de pluie assure l’alimentation des chasses d’eau et l’arrosage des espaces plantés. Cette construction bas-carbone a reçu, en 2018, la distinction « Excellence », niveau le plus élevé du label Bâtiment Bas Carbone (BBCA).